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et des jaunes, en contraste avec les massifs primaires rouges ou bruns de la périphérie.

Paris occupe à peu près le centre de ces auréoles concentriques, le centre de ce bassin, comme Londres et Vienne sont au centre de pareils bassins tertiaires ; et ce n’est pas par un hasard ni par l’effet d’un caprice souverain que la capitale de la France a grandi là, et non ailleurs. La disposition conchoïdale de ce Bassin parisien, esquissée dès la fin des temps primaires, a préparé la centralisation française et provoqué cette convergence de nos voies ferrées qui semble drainer tout le sang, toute l’activité de la France vers un point unique. La région où viennent se rassembler la Seine, la Marne et l’Oise était toute désignée par la nature pour concentrer les produits du Sud, de l’Est et du Nord, d’autant que, vers l’Ouest, aucun obstacle naturel ne s’opposait à des facilités de communication analogues. La large extension quaternaire de la Seine, en préparant une vaste plaine, semée de quelques saillies fortifiables, restes de terrains tertiaires érodés, a favorisé l’établissement d’une grande agglomération humaine qui avait commencé dès l’époque préhistorique. La constitution si favorable du sous-sol a fait le reste, fournissant sur le même point l’argile pour les briques et les tuiles, une pierre de taille abondante, un plâtre incomparable.

Il a fallu tant de bonnes raisons pour que la capitale du pays s’établit, grandit et subsistât dans une situation militairement aussi mauvaise, forçant tant de fois, au cours de notre histoire, le gouvernement à émigrer. Des villes qui, géographiquement, occupent une place beaucoup plus centrale, comme Bourges, Orléans, Blois ou Tours, sont, par rapport au bassin géologique, dans une position excentrique d’où résulte pour elles une infériorité manifeste. Ainsi Bourges, où s’est un moment réfugiée la royauté, se trouvant déjà sur la bordure jurassique, est accolée aux parties saillantes du territoire : ce qui la prive de débouchés faciles dans le sens de l’Est et du Sud-Est. Les eaux, qui viennent du Plateau Central, n’ont pas encore eu le temps de s’y rassembler pour former une grande voie fluviale. Orléans, qui doit son importance au coude de la Loire par suite duquel elle est le point de transit naturel entre Paris et le Centre, n’a pas non plus les moyens de commerce parisiens.

C’est pourquoi, la conquête de Paris étant l’objectif principal d’un ennemi, les lignes de défense que la nature nous a