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des Doges ; Sebenico, Spalato, pleine du souvenir de Dioclétien, conservent des monumens de la Sérénissime République.

C’est que les provinces du littoral comme le Trentin furent à plusieurs reprises terre italienne ; nous verrons même qu’un moment ils faillirent définitivement le redevenir.

Le Trentin semble prédestiné à servir de terrain de luttes entre les Italiens et les Allemands. De longues compétitions entre les Goths, les Lombards, les empereurs, les ducs de Bavière, remplissent le moyen âge. Le Tyrol fut acquis au XIVe siècle par les Habsbourg. L’évêque de Trente fut membre du Saint-Empire, à côté des évêques de Brixen et de Coire. Sécularisé en 1803, le Trentin septentrional fut, à la paix de Presbourg, donné par Napoléon à la Bavière avec le Tyrol autrichien ; la partie méridionale, incorporée à la Lombardie. Tandis que Brixen et Méran restaient à la Bavière, Bolzen et Trente devenaient italiennes, cette dernière comme chef-lieu du département du Haut-Adige. — C’étaient les patriarches d’Aquilée, les Vénitiens, les ducs de Carinthie, les margraves d’Istrie qui se disputaient la possession de Trieste. Tour à tour pillée par ses voisins, la cité invoqua l’appui germanique, et par le traité de Gratz, en 1382, se mit sous la protection des ducs d’Autriche, dont elle fut désormais « la ville très fidèle. » Mais Trieste, au point de vue économique, restait tributaire de Venise. Les flottes de la République demeuraient maîtresses de l’Adriatique, il golfo di Venezia, établissaient comptoirs et colonies dans les villes dalmates, jusqu’à Corfou, et, de là, cinglaient vers l’Orient, Au XVIIIe siècle seulement, alors que décline la prospérité de Venise, l’empereur Charles VI commence celle de Trieste en encourageant ses commerçans et ses armateurs. En 1803, Napoléon obligea l’Autriche à lui céder la côte de l’Adriatique, dont, à Campo-Formio, elle avait hérité de Venise. Ce fut le prix d’Austerlitz. En 1806, l’Istrie était proclamée Xe province du royaume d’Italie [1]. Ainsi, à Trieste, de même qu’à Trente, nous voyons dans Napoléon un précurseur des revendications irrédentistes.

Le Congrès de Vienne devait restaurer la domination des Habsbourg à Trieste, tandis que l’empereur d’Autriche, « comte princier du Tyrol, prince de Trente et de Brixen, » succédait à

  1. En 1808, Napoléon créa Cessières « duc d’Istrie » pour ses services rendus en Espagne.