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REVUE DRAMATIQUE

LA RÉOUVERTURE DES THÉÂTRES

La déclaration de guerre avait eu pour effet immédiat de fermer les quelques scènes parisiennes qui continuent à donner des représentations en été. Depuis lors, la guerre s’est prolongée, beaucoup de ceux qui avaient quitté Paris y sont rentrés, tout le monde a fait un louable effort pour reprendre, dans la mesure du possible, son activité ordinaire. Les théâtres ont été autorisés à rouvrir, sous le contrôle de deux ou trois censeurs. Ils ont été à peu près unanimes à ne faire de la permission qui leur était octroyée aucun usage. Ni le Vaudeville, ni le Gymnase, ni aucun des théâtres de genre classés n’en ont profité. Des deux théâtres de déclamation subventionnés, seule la Comédie-Française a, non pas ouvert, mais entr’ouvert ses portes. Ici ou là on annonce une série de représentations sans lendemain. Ailleurs on organise des matinées dites nationales, avec récitations et allocutions patriotiques. Ailleurs on donne, au bénéfice de quelque œuvre de secours militaire ou d’assistance sociale, des spectacles coupés. En somme, un minimum de vie théâtrale. Et c’est encore un des aspects particuliers à cette guerre qui ne ressemble à aucune autre. Aux époques les plus troublées ou les plus sinistres, on a continué d’aller au théâtre ; les chroniqueurs ont pu écrire l’histoire des théâtres de Paris pendant la Révolution, pendant les guerres de l’Empire, même pendant le siège de Paris : pour la première fois nous assistons au chômage à peu près complet de nos théâtres.

A cette abstention, en partie volontaire, il y a d’abord des causes morales. Elles sont trop faciles à deviner, et d’ailleurs trop douloureuses, pour qu’il soit besoin d’y insister. Dans nos sociétés