Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 25.djvu/430

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

On voit donc que nous faisons à nos prisonniers une situation beaucoup plus favorable que celle qui est faite à nos soldats en Allemagne.


Le lieutenant-colonel Meyret a donné, d’une façon humoristique, l’emploi des 45 francs qu’il touchait comme capitaine [1] : logement et café au lait du matin, 18 francs ; pension par jour, 1 fr. 40 ; soit 42 francs ou 43 fr. 40, lorsque le mois était de trente et un jours ; il était donc à découvert, chaque mois, de 15 francs ou de 16 fr. 40 sans compter le blanchissage, le tabac et les menues dépenses d’entretien.

Emu de cette situation précaire, misérable, le gouvernement français fit servir aux officiers, par les soins de l’ambassade anglaise, un supplément mensuel uniforme de 30 francs.


Consacrons un mot à la libération des prisonniers de guerre pour donner une preuve de plus de la rapacité du caractère allemand.

L’article 14 de la Convention signée le 28 janvier 1871 pour l’armistice concernait les prisonniers ; il fut confirmé le 10 mai suivant.


Il sera procédé immédiatement à l’échange de tous les prisonniers de guerre qui ont été faits par l’armée française depuis le commencement de la guerre. Dans ce but... Les échanges devaient avoir lieu en nombre pareil de prisonniers de guerre français du grade correspondant.


Le 17 février, l’armistice fut prolongé jusqu’au 26 et les préliminaires de paix signés le même jour.

Le 12 mars, les officiers furent enfin autorisés à solliciter une permission de rentrer en France à leurs frais, en profitant toutefois de la réduction de demi-place accordée aux militaires sur les chemins de fer allemands ; l’intervention de M. Thiers leur procura l’allocation d’une petite indemnité dite de rapatriement.

Le gouvernement prussien notamment manœuvra alors de façon à extorquer le plus d’argent possible aux prisonniers.


... Aux mois de mai et de juin, les officiers et les soldats payaient encore leur voyage. A Memel, qui est la ville la plus éloignée, on demandait aux soldats 5 thalers ou 18 fr. 75 ; quand ils ne les avaient pas, on marchandait

  1. Meyret (lieutenant-colonel), op. cit., p. 192.