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l’homme, dont les races durent à peine un jour, a pu être le témoin surpris de leurs débordemens. On sait que, vers le milieu de l’époque tertiaire, il s’est produit de grandes surrections montagneuses qui ont substitué les hauteurs des Alpes à ce qui, peu auparavant, était encore une mer dont les coquilles se sont alors trouvées soulevées vers leurs cimes. De tels événemens n’ont pas eu lieu sans que, dans les régions voisines, on ait vu : ici des reflux de la mer ; là, des ondulations du sol sous l’impulsion de ces sortes de vagues qui ont plissé et tordu les couches terrestres ; ailleurs, des dislocations et des affaissemens de compartimens entiers, comme la vallée du Rhin ou la Limagne ; puis des changemens de climat, des manifestations glaciaires et des fontes de neiges. De cette histoire très complexe, il est résulté finalement des évacuations d’eau formidables dont nous rencontrerons bientôt quelques exemples particuliers, avec des entraînemens énormes de matériaux démantelés venant combler des lacs, encombrant des estuaires ou roulant de proche en proche jusqu’à la mer. Pendant toute une période géologique qui n’est pas encore terminée, la nature a travaillé à remettre de l’ordre dans le chaos provoqué par ce plissement alpin que les géologues d’autrefois auraient appelé une convulsion ; elle a surtout abouti à régulariser le régime des rivières et des fleuves de manière à leur assurer vers la mer un écoulement régulier à pente continue ; et cet écoulement dont la disposition nous est familière, nous le trouvons tout simple, parce qu’il a été préparé et réglé avant nous, mais sa complication réelle est égale à celle des canalisations et des égouts, par lesquels l’eau arrive ou s’écoule dans les sous-sols d’une grande ville. L’érosion, qui a été accomplie alors dans un bassin de sédimentation tel que la cuvette parisienne, a eu pour premier résultat d’entailler plus ou moins profondément une série de couches ou de sédimens d’abord empilés les uns par-dessus les autres au fond des mers ou des lacs. Ces empilemens ont été alors perforés et découpés à partir d’en haut comme peuvent l’être les feuillets d’un livre en proie aux tarets dans une vieille bibliothèque. Ils l’ont été avec une vitesse inégale et avec des résultats variables suivant que le niveau attaqué était quelque couche dure de calcaire compact, de meulière, de grès, ou quelque couche affouillable de marne ou d’argile. Rencontrant généralement des alternances de ces terrains