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vue international. Elle est devenue, dans une mesure comparable à celle de Londres, le banquier d’une partie du monde, avec cette différence que les maisons anglaises, dont on désigne souvent l’ensemble sous le nom de Cité, ouvrent surtout des crédits aux négocians importateurs ou exportateurs de marchandises, tandis que les banques françaises se spécialisent plutôt dans les transactions financières proprement dites, ayant trait aux emprunts d’Etat, aux actions et obligations de toute nature. Cette tendance de nos établissemens s’est accentuée, en raison du goût de plus en plus prononcé de notre public pour les placemens en valeurs mobilières et particulièrement en valeurs étrangères, auxquelles nos épargnans trouvaient le double mérite de fournir un revenu plus élevé que les titres nationaux similaires et de soustraire le capital ainsi placé à quelques-uns des risques qui leur paraissaient à redouter dans leur propre pays. Ce n’est pas ici le lieu de discuter cet état d’esprit, qui va sans doute se trouver modifié par la guerre : les occasions de placemens avantageux en fonds français seront nombreuses ; des Bons du Trésor rapportant 5 et des Bons de la Ville de Paris rapportant 5 et demi pour 100 sont d’ores et déjà une aubaine qui eût paru invraisemblable il y a six mois.

D’autre part, le crédit de plusieurs pays étrangers, auxquels nous avions confié un peu légèrement nos capitaux, subit une atteinte sérieuse, en dépit de leur neutralité et de leur éloignement. Ils n’ont pas cessé d’avoir besoin de notre aide pour se développer, et n’ont pas encore suffisamment mis en valeur leurs ressources propres pour faire aisément face à tous les engagemens, durant la période d’épreuves que nous traversons.

Hâtons-nous d’ajouter que, pour plusieurs de ces pays, notamment les grandes Républiques de l’Amérique du Sud, la situation est déjà en voie de s’améliorer. C’est ainsi qu’au Brésil, la balance du commerce extérieur s’est modifiée brusquement. L’an dernier, les importations dépassaient les exportations ; depuis plusieurs mois, au contraire, celles-ci atteignent des chiffres très supérieurs aux premières et fournissent au pays les ressources dont il a besoin pour acquitter ses engagemens au dehors. Il est vrai que le gouvernement fédéral a dû conclure avec les porteurs de ses rentes un engagement qui lui permet de leur payer temporairement leurs coupons en titres, solidement garantis d’ailleurs par les douanes de Rio-de-Janeiro. Pareille convention