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le mois d’août : l’une et l’autre ont été l’objet de mesures spéciales, dont le but était de retarder l’exécution d’engagemens pris avant l’ouverture des hostilités. En ce qui concerne les établissemens de crédit, c’est-à-dire les sociétés par actions, dont la fonction principale consiste à recevoir les dépôts du public et à les faire fructifier en les employant notamment à l’escompte du papier commercial ou financier, la déclaration de guerre les a surpris en pleine activité. Beaucoup d’affaires étaient en préparation : certains emprunts étrangers, émis au cours du premier semestre de 1914, et l’emprunt français 3 et demi du 7 juillet, n’étaient pas encore entièrement classés, c’est-à-dire entrés dans le patrimoine des capitalistes. Au premier moment de l’émoi causé par la note autrichienne et de la panique qui suivit la déclaration de guerre, les banques se procurèrent des ressources en réescomptant à la Banque de France une grande partie des traites qu’elles avaient antérieurement acquises : du 27 juillet au 6 août, le portefeuille de notre grand institut d’émis- sions augmenta de 2 352 millions ; du 6 août au 1er octobre, il progressa encore de 541 millions, si bien que, de 1 504 millions au 21 juillet, il passa en deux mois et dix jours à 4 476 millions : en chiffres ronds, il tripla. Malgré l’aide puissante qu’elles avaient ainsi reçue, les banques n’avaient pu mobiliser, c’est-à-dire transformer en espèces ou en crédits immédiatement disponibles, des sommes égales à la totalité de leurs dépôts. En effet, elles n’emploient pas ceux-ci exclusivement à l’escompte de papier bancable ; on appelle ainsi les lettres de change remplissant les conditions voulues pour être achetées par la Banque de France. Elles font des reports, des avances sur titres ; et cela non seulement en France, mais aussi à l’étranger, où il arrivait fréquemment que les taux fussent plus rémunérateurs que dans notre pays. Les reports, c’est-à-dire les prêts sur valeurs mobilières cotées à la Bourse, opérés dans des conditions spéciales, arrivaient bien à échéance le 31 juillet ; mais le règlement des opérations engagées à Paris ayant été ajourné, ces sommes ne sont pas encore rentrées dans les caisses des établissemens prêteurs. Elles ne s’élèvent toutefois, au parquet des agens de change, qu’à une soixantaine de millions.

Une autre cause qui explique les difficultés passagères contre lesquelles nos banques ont eu à lutter est l’importance prise, au cours du XIXe et du XXe siècle, par la place de Paris au point de