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songe au nombre des alliés qui réclameront leur part de la rançon à exiger de l’Allemagne et de l’Autriche-Hongrie (nous ne parlons que pour mémoire de la Turquie), on voit qu’il nous est difficile d’espérer pouvoir recouvrer la totalité de nos débours. Admettons qu’il nous reste en fin de compte à nous procurer un capital de 12 milliards de francs. On ne saurait admettre un chiffre inférieur, d’autant moins qu’il ne s’agit pas seulement de solder les frais de la guerre proprement dite, mais qu’il y aura des sommes énormes à dépenser pour la reconstruction de tout ce qui a été détruit. Notre évaluation est donc modeste. L’annuité à inscrire de ce chef au budget ne sera pas inférieure à 600 et peut-être 700 millions, si nous faisons, comme il serait sage de nous y décider, une large part à l’amortissement. Il faut espérer que le budget de l’armée et de la marine pourront être réduits d’autant. Avec les économies que nous devrons réaliser sur un certain nombre de services civils, absurdement développés depuis le commencement du siècle, nous contiendrons alors du total de nos dépenses aux environs de 5 milliards, chiffre qui nous eût encore paru démesuré il n’y a pas dix ans et qui ne devrait pas être dépassé, aussi longtemps tout au moins que notre population n’augmentera pas.

Il conviendra de faire une place importante, dans ce budget rénové, à l’amortissement de notre dette, dont le capital dépassera vraisemblablement après la guerre 40 milliards, et atteindra peut-être 50 milliards, c’est-à-dire 1 250 francs par tête d’habitant. Le sentiment de cette nécessité est aujourd’hui général : l’emprunt de juillet 1914 fut créé selon cette formule. Afin de ne pas trop charger la génération actuelle, l’amortissement des rentes qui auront pour objet de liquider les dépenses de la guerre pourra s’étendre sur une période plus longue que les vingt-cinq ans prévus pour les 900 millions de 3 et demi. Il sera légitime de faire porter une partie du poids sur nos enfans et nos petits-enfans qui, nous en avons la conviction, profiteront encore des résultats obtenus par nous au prix de tant d’efforts. On sait d’ailleurs que la rente 3 et demi de 1914 est destinée à disparaître, en vertu de la décision du Ministre des Finances qui déclare qu’elle sera reçue à son taux d’émission, en paiement des futurs emprunts. Il n’est pas douteux que les porteurs s’empressent de faire usage de ce droit. Il