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SOUVENIRS DE BORDEAUX
1871-1914

IV[1]

Le mercredi 1er mars 1871, à midi et demi, les membres de l’Assemblée nationale, au nombre de 675, étaient réunis dans la grande salle du Théâtre Louis. Les tribunes avaient été envahies par une affluence énorme. On y apercevait une foule de dames élégantes, presque toutes vêtues de noir. Le questeur Baze, qui n’avait jamais été autant sollicité, se démenait avec une agitation comique et envoyait promener sur les Quinconces ceux dont le faciès ne lui revenait pas. Tout le monde voulait assister à cette séance que l’on prévoyait orageuse et, quoique les tribunes, les galeries et le Paradis fussent pleins à se rompre, il arrivait à tout moment des Ilots de quémandeurs que les huissiers avaient peine à écarter. Les plus hardis avaient pénétré, malgré une consigne rigoureuse, jusque dans les coulisses et même dans les bas-côtés de la salle. Le chef des huissiers, pénétré de la gravité de ses fonctions et de leur importance, donnait des ordres sévères qui n’étaient qu’à moitié exécutés. Après le dépôt des pétitions protestant d’avance contre la cession de l’Alsace-Lorraine, dépôt opéré par Scheurer-Kestner, Floquet, Claude des Vosges et Émile Keller,

  1. Voyez la Revue des 1er et 15 novembre et du 15 décembre 1914.