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Et opposant à Trochu la trinité surprenante de Bara, Garibaldi et Kléber, il terminait sa philippique par ces deux vers :


Ce fier pays saignant, blessé, jamais déchu,
Marche par Gambetta, mais boîte par Trochu !


Il est permis de dire que l’auteur des Châtimens a écrit des vers bien meilleurs que ceux-là. Et le képi de Victor Hugo restera, malgré lui, aussi légendaire et aussi comique que la perruque de Chapelain.


A ce moment, — c’était le 24 février, — le général Chanzy fut appelé à Paris par le gouvernement de la Défense nationale pour donner nettement son avis sur la situation. Fallait-il, oui ou non, continuer la guerre ? Le pouvait-on avec quelque espoir de succès ?... Le général répondit loyalement, — j’en ai eu l’assurance formelle par Charles Ferry qui le tenait directement de son frère Jules, — ce que le maréchal Ney avait dit à la Chambre des représentans le lendemain de Waterloo : « Inutile de lutter ! Vous êtes détruits ! » Ceci décida Jules Favre à insister avec M. Thiers sur la nécessité de signer au plus tôt des préliminaires de paix. Il est vrai cependant que le 1er mars, — comme on le verra, — Chanzy, avec les généraux Billot, Mazure et Loysel, se prononça contre le vote de ces mêmes préliminaires.. Mais, si regrettable que soit cette volte-face, il faut reconnaître que le commandant en chef de l’armée de la Loire qui avait révélé des qualités exceptionnelles de manœuvrier et avait dit : « Celui qui voudra être maréchal de France devra chercher son bâton au delà du Rhin ; » celui qui avait encouru la haine des Communistes et failli être fusillé par eux, celui-là devait avoir quelque peine à ratifier un traité qui avouait nos défaites. Cette réflexion n’est d’ailleurs pas une excuse ; elle est une explication facile à comprendre. On parlait dans les différens groupes de l’humiliation qui allait être imposée à Paris par l’entrée des soldats allemands, et le général Trochu, qui s’en émouvait plus que d’autres, écrivait à la Liberté que les Prussiens, après quatre mois et demi de siège, huit combats, quatre batailles et un long bombardement, auraient dû faire à Paris