Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 24.djvu/85

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
CAROL IER
ROI DE ROUMANIE

Nous ignorons encore si la mort du roi Carol aura pour résultat plus ou moins prochain l’entrée en campagne de l’armée roumaine et son intervention en faveur de la Triple-Alliance. Jamais, en tout cas, cette intervention n’eût été possible avec lui : il aurait renoncé à sa couronne plutôt que d’y consentir. Quand, au début de la guerre actuelle, il proposa à ses ministres la mobilisation générale, ceux-ci, dit-on, lui répondirent : — « Nous voulons bien, si c’est contre l’Autriche. » — « Non, déclara le Roi, car j’ai donné ma parole à l’Empereur Guillaume, et un Hohenzollern n’a qu’une parole. » A quoi M. Bratiano, président du Conseil et ministre de la Guerre, aurait répliqué : « Le pays ne connaît pas de Hohenzollern ; il ne connaît que le roi de Roumanie. »

D’autres rois électifs ont cru devoir se dégager entièrement de leurs liens de famille et de patrie en montant sur un trône étranger. Il n’en a pas été de même du roi défunt. « Bien que je sois aujourd’hui prince de Roumanie, télégraphiait-il en 1869 au roi Guillaume, je reste toujours un Hohenzollern. » Il appartenait à la branche Sigmaringen (branche aînée, quoique non régnante et restée catholique de celle famille), et son père, le prince Antoine, avait toujours témoigné le plus entier dévouement à la Prusse, à qui il avait cédé, en 1849, ses droits de souveraineté et de gouvernement. Lui-même avait fait ses études militaires à Berlin et ses premières armes, lors de la guerre du Slesvig-Holstein, dans un régiment prussien. Mais, d’autre part, de nombreux liens le rattachaient à notre pays.