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1910 par le ministère de l’Intérieur. Le président de cette commission, l’ingénieur Alfred Picard, a d’ailleurs donné dans son rapport récapitulatif un aperçu lumineux de la politique forestière qu’il avait en vue pour servir l’intérêt général sans léser les intérêts particuliers ; il conviendrait de l’appeler politique économique, mais on la désigne sous le nom de politique libérale pour ne pas laisser croire qu’elle puisse être appliquée sans dépense initiale : « Une obligation impérieuse, disait-il, incombe aux pouvoirs publics, pour le bassin de la Seine de même que pour le surplus du territoire : conserver intacts les massifs boisés existans, encourager les plantations nouvelles, inculquer les bonnes méthodes d’exploitation, pousser à la production des bois d’œuvre en remplacement des petits bois, soulager les propriétaires forestiers qu’écrase l’impôt et qui sont entraînés à alléger leurs charges par l’abatage d’un plus grand nombre d’arbres de futaie.

«… Les funestes conséquences de l’inaction qui a suivi les catastrophes du passé doivent être un avertissement salutaire. Des résolutions promptes et courageuses honoreront la génération actuelle, attesteront sa sagesse et son esprit de prévoyance. »

On a peine à croire que cet éloquent appel, lancé après la désastreuse inondation de Paris par une voix si autorisée, n’ait eu jusqu’ici d’autre effet sur les pouvoirs publics que de faire élargir l’Administration des Eaux et Forêts par l’adjonction de l’Hydraulique agricole, de prévenir la destruction de la forêt d’Eu et de faire préparer par une Commission temporaire de réorganisation quelques projets de décrets pour la création d’un Comité consultatif des forêts, d’un Office de renseignemens forestiers et d’un Service scientifique des forêts, destinés à combler d’invraisemblables lacunes. De son côté, l’Association centrale a redoublé ses efforts, préparé les textes de lois complémentaires, étudié l’organisation d’un Crédit forestier, et entrepris d’initier le public à l’économie et à la politique forestière en créant à la Faculté des sciences de Bordeaux un cours libre de Sylvonomie[1], complément de la Sylviculture aussi indispensable que l’Agronomie l’est pour l’Agriculture.

  1. Les deux premières années de ce cours sont publiées en édition populaire sous le titre d’Élémens de Sylvonomie (Bordeaux, 1913, Librairie Féret) et de l’Evolution de la politique forestière (Paris-Nancy, 1914, Berger-Levrault).