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préparatifs du conclave. Dans l’après-midi, le corps du Pape ayant été descendu dans Saint-Pierre, la foule put défiler devant le catafalque. Le président de Brosses nous l’a décrit. « Il est magnifique, dit-il, d’un grand goût, orné d’architecture, de statues peintes, et de médaillons, d’inscriptions et de tableaux représentant les principales actions du pontificat et les monumens élevés par le Pape. On n’y a pas oublié le port d’Ancône et la construction d’un beau lazaret au milieu de la mer. Il est étonnant qu’on ait pu avec tant de promptitude élever un catafalque que l’on pourrait appeler un édifice. »

Les trois jours suivans, en présence de la cour pontificale et de la noblesse romaine, une messe solennelle de Requiem fut célébrée dans Saint-Pierre par le plus jeune cardinal de chaque ordre. Assemblé ensuite dans la sacristie de la basilique, le Sacré Collège vérifia les pouvoirs des magistrats et des fonctionnaires de tout l’État ecclésiastique. Cette fastidieuse besogne occupa plusieurs séances heureusement coupées par la réception des ambassadeurs, venus apporter les condoléances de leurs princes. Le reste du temps fut consacré aux préparatifs du conclave et à l’audition des cardinaux préposés aux travaux. Ceux-ci étaient immenses, et le peu de jours que l’on avait pour les exécuter en décuplait la difficulté.

La clôture du conclave n’étant levée en aucun cas, les cardinaux devaient assurer d’avance la santé de leurs âmes et de leurs corps. Aussi, les 12, 13 et 14 février, firent-ils choix d’un confesseur, de deux médecins, d’un chirurgien, d’un pharmacien, de quatre barbiers et de domestiques variés. Le cardinal Sacripante, le plus jeune des diacres, tira ensuite au sort les cellules du conclave : attribution qui avait certes son importance, car, si aucun des logemens destinés à Leurs Éminences n’était confortable, certains d’entre eux étaient de véritables taudis. Le hasard aveugle favorisa en première ligne le cardinal Coscia ! Rohan fut après le mieux partagé : la plus méchante cellule échut à Fleury, qui ne s’en soucia guère, ne devant pas venir à Rome ! Le 13 février, après la messe, cinq cardinaux donnèrent tour à tour l’absoute au Souverain Pontife. Cette cérémonie se répéta les deux jours suivans et attira, par sa pompe, un grand concours de peuple. Le Sacré Collège examina ensuite la liste des « conclavistes. » On appelle ainsi les deux prêtres que tout cardinal a le droit d’emmener au conclave,