Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 24.djvu/317

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ces conseillers voyaient les choses tout autrement que M. Barclay et ses amis français en ce qui concernait le sentiment public en France. L’invitation serait donc certainement déclinée. Trois ans plus tard, celui qui était non plus le Prince de Galles, mais le roi d’Angleterre, prenait sur lui de venir à Paris et n’avait pas à regretter sa décision.

Nous n’aurons jamais trop de reconnaissance et d’admiration pour le grand souverain qui ouvrait ainsi une phase nouvelle dans l’histoire de l’Europe contemporaine. Il s’en fallait de beaucoup, surtout à Paris, que l’atmosphère, après tant d’orages, fût tout à fait sereine, et la Chambre de commerce de la capitale n’avait pas encore osé émettre une résolution en faveur de l’Entente. M. Barclay, à la lecture de l’entrefilet qui annonçait la visite royale, téléphona au secrétaire de la Présidence, qui lui donna confirmation de la nouvelle et lui offrit une audience du Président. Au cours de cette entrevue, M. Barclay exprima l’opinion que la visite devrait être ajournée à l’année suivante. Mais le Président déclara que c’était impossible, qu’un ami personnel du Roi l’avait arrangée et que Sa Majesté elle-même désirait qu’elle eût lieu. Aussi bien, du côté français, on expliquerait, aux chefs de partis et aux guides de l’opinion que le roi d’Angleterre n’est pas un souverain à la charge duquel on puisse mettre les actes de tel ou tel gouvernement particulier, que le Roi avait toujours été un ami de la France, et que, par-dessus tout, la France avait un devoir d’hospitalité à remplir en même temps qu’un intérêt à défendre, celui de la paix entre deux peuples qui, en dépit d’égaremens occasionnels de part et d’autre, représentent tout ce qui est grand et noble dans l’histoire de l’humanité. Par prudence, on recommanderait aux enthousiastes de modérer leurs acclamations et aux mécontens de se taire.

De son côté, M. Thomas Barclay jugea bon d’aller faire campagne en Écosse et au nord de l’Angleterre, de manière à y créer un courant de sympathie auquel la France voudrait répondre. Accompagné du correspondant du Temps à Londres, M. Charles Schindler, il organisa des réunions à Glasgow le 20 avril, à Edimbourg le 22, à Dundee le 24, à Galashiels le 27. Sous le patronage des Chambres de commerce et avec l’aide des premiers citoyens de ces quatre grands centres, des comités locaux furent formés pour le développement de l’entente