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Une observation très curieuse de MM. Violle et Pottevin nous mettra peut-être sur la voie :

Faisant des essais de dosage de la toxine (car une toxine se dose comme n’importe quelle substance) sur des lapins, ils examinent, immédiatement après la mort, l’intestin sur toute sa longueur. Un fait se révèle à leur attention très minutieuse : les biais de l’intestin sont un peu plus prononcés à partir d’un point. Ils recherchent quel est ce point, et voient que c’est immédiatement dans le voisinage de l’ouverture du canal du pancréas. Hypothèse aussitôt émise : les sucs digestifs, les glandes digestives doivent jouer un rôle dans le choléra.

Ils font de nombreuses expériences sur le pancréas, le foie, les glandes digestives, etc., et le résultat final est qu’il y a un lieu d’élection dans l’intestin pour la production du choléra, que le suc pancréatique favorise le développement du vibrion.

Le foie, au contraire, joue un rôle d’arrêt. Cette glande volumineuse, pesant plus de 1 200 grammes chez l’homme, sécrète une grande quantité de bile qu’elle verse dans l’intestin par un canal, le cholédoque qui y débouche immédiatement après l’estomac, neutralise ainsi beaucoup de poison, et entrave nettement le développement du vibrion ; mais s’il y a arrêt dans la production de la bile, ou si le canal empêche la bile de se déverser dans l’intestin, l’animal qui a reçu une quantité infime de vibrions meurt d’une attaque typique du choléra.

Tels sont les résultats des expériences de MM. Violle et Pottevin, très importantes, puisqu’elles mettent en évidence le rôle joué par le foie, et qu’elles permettront peut-être de comprendre plus tard pourquoi les épidémies sont plus fréquentes dans les pays chauds, ou en été, et chez des sujets surmenés, et dans toutes conditions où il y a surmenage du foie et arrêt de la bile.


CHARLES NORDMANN.