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pour invoquer ses intérêts spéciaux. M. Baldacci, professeur à l’Université de Bologne, a indiqué avec franchise ce plan concerté : « La politique italienne se sert des Italo-Albanais comme point d’appui pour exercer une influence sur les populations balkaniques, d’autant plus que le voisinage de cette colonie avec la côte d’Illyrie, la parenté avec certaines familles, l’analogie et la communauté d’histoire, de coutume et de commerce fournissent des droits et des raisons pour intervenir. » Les Italiens ont favorisé la renaissance nationale de l’idée albanaise et ont donné asile à une société nationale albanaise et à des journaux, écrits d’abord en italien, puis en albanais, qu’ils répandirent ensuite de l’autre côté de l’Adriatique. Par ces intermédiaires, les dons pouvaient facilement être distribués dans l’autre presqu’île. Par eux surtout, on chercha à exercer une influence sur les Albanais, et quels meilleurs agens à transplanter sur l’autre rive adriatique ! L’Italie y trouvait double avantage : celui de posséder sous la main des intermédiaires précieux, celui d’avoir des agens commerciaux excellens pour le développement du trafic italo-albanais.

A Vallona, le vice-consul d’Italie me présente, par exemple, le chancelier du Consulat ; c’est un M. Bosio, qui exerce le métier d’agent de la Compagnie de navigation la » Puglia ; « il est né dans les Pouilles d’une famille albanaise transplantée en ce lieu ; et de même origine sont la plupart des Italiens qui forment la colonie italienne de Vallona, cent familles environ, petites gens faisant le commerce en boutique et servant d’intermédiaires entre le royaume qui envoie ici ses produits fabriqués, ses étoffes, ses vins, son blé ou sa farine et les Albanais, qui exportent en Italie les peaux et la laine de leurs bêtes et l’huile de leurs oliviers.

L’Italie encadre cette colonie, comme à Durazzo et comme à Scutari, par une organisation à elle, dont le chef est le consul et dont les linéamens sont formés des écoles royales, de l’agence de la « Puglia » avec les intérêts qui gravitent autour de celle-ci, et des postes italiennes. D’après un rapport de la direction générale des écoles italiennes à l’étranger, Vallona comme Durazzo posséderait trois écoles royales, une de garçons, une de filles, et une école du soir avec 400 élèves environ dans chacune de ces villes. A Scutari, cinq écoles, dont deux crèches, recevraient un nombre un peu plus grand d’enfans. D’après