Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 17.djvu/885

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Madrid, l’Angleterre est considérée, dans tous les milieux politiques, comme une amie du premier degré. En ce qui concerne la France, les discussions marocaines ont soumis à une rude épreuve l’entente amicale généralement souhaitée ; des influences étrangères se sont acharnées à exaspérer les malentendus, et nous avouerons que des maladresses gouvernementales, d’un côté et de l’autre des Pyrénées, ont naguère compliqué les entretiens des diplomates. L’événement a fini par prouver, grâce à la patiente habileté des négociateurs, que les motifs d’accord l’emportaient sur ceux de rupture ; le traité marocain est une transaction honorable pour les deux parties, précieuse plus encore par l’esprit de concorde dont il a témoigné que par la lettre de ses articles touffus. De l’avis de plusieurs hommes d’Etat espagnols, ce doit être un point de départ. Au Maroc même, la France et l’Espagne représentent la civilisation ; elles feront œuvre plus sûre en concertant leurs efforts, pour délimiter sur le terrain une frontière bien comprise, réprimer la contrebande des armes, presser la pénétration par le rail, réviser le régime suranné de la protection. Les journaux ont relevé comme un symbole que le dernier-né d’un haut fonctionnaire espagnol de Tétouan avait eu pour parrain le général Alfau et pour marraine la femme du consul de France en cette ville.

Par ailleurs, et comme préface au traité de commerce dont l’élaboration n’ira pas sans grincemens, une entente serait désirable entre les deux pays sur bien des questions de transit et de mitoyenneté. L’Espagne est la dernière étape de l’Europe vers l’Afrique, et aussi vers l’Amérique méridionale ; elle occupe une position centrale, elle est à un nœud de communications entre les pays latins du vieux monde et leurs prolongemens sur les continens nouveaux. En 1908, ce sont des groupes économiques qui ont organisé l’Exposition franco-espagnole de Saragosse. Les mêmes poussent au développement des échanges et voudraient assurer à l’Espagne tous les avantages de sa situation géographique d’intermédiaire ; dans cet esprit, ils multiplient articles, conférences, voyages, en vue de rapprocher l’Espagne de ses anciennes colonies américaines. Celles-ci, sous la forme républicaine, redeviennent des parentes affectueuses de la vieille métropole, qui poursuit son évolution moderne en monarchie ; l’infante Isabelle fut reçue en souveraine à Buenos-Aires, lorsque, en 1910, elle apporta l’hommage de la maison