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d’une alliance formelle avec nous et avec l’Angleterre, le nombre est minime aussi de ceux qui, à l’exemple de M. Sanchez Toca, iraient volontiers jusqu’à cette combinaison. L’Espagne, en somme, n’est pas disposée à assumer des obligations auxquelles, une fois acceptées, elle ne penserait pas un instant à se soustraire, et qui l’entraîneraient à donner une ampleur disproportionnée à son armature militaire. En revanche, on condamne la politique de l’isolement, qui a naguère laissé la nation sans amitiés actives en face des États-Unis . L’idée dominante serait dès lors celle d’une entente de l’Espagne avec tous ses voisins, c’est-à-dire avec la France, l’Angleterre et aussi le Portugal. C’est une formule d’accord extrêmement pratique, par laquelle s’exprime sur le terrain international la volonté de l’Espagne d’être quelque chose de vivant et d’original, sans s’astreindre à des charges qui seraient justement taxées de mégalomanie somptuaire. Divers personnages politiques insistent sur l’opportunité de traduire ainsi les désirs de bonne amitié naturelle entre des voisins que ne séparent pas des malentendus fondamentaux.

Ainsi pense M. Navarro Reverter qui fut, en 1892, le signataire d’un traité hispano-portugais. Cette convention, surtout commerciale, a été prorogée tacitement en 1902 et a fait l’objet en 1912, malgré le changement de régime en Portugal, d’une mission d’enquête, concertée entre les deux gouvernemens. On avait prononcé le mot d’union douanière ibérique, mais des protestations se sont élevées à Barcelone, et jusqu’ici on s’est borné à proroger les clauses du traité de 1892. L’incertitude politique, en Portugal contribua sans doute à ce que, jusqu’à la fin de l’été de 1913, rien de définitif n’ait été arrêté. Mais l’idée doit être signalée ; elle ne sera probablement pas abandonnée. Le succès d’un tel projet ne manquerait pas d’intéresser beaucoup l’Angleterre et la France, principales clientes et voisines sympathiques de l’Espagne ; il pourrait aussi faciliter aux deux partenaires l’exploitation combinée et une mutuelle garantie de leurs territoires coloniaux du golfe de Guinée.

Avec l’Angleterre, l’Espagne a conclu une entente navale, qui remonte au moins à l’entrevue d’Edouard VII et d’Alphonse XIII (Carthagène, 1907). Les relations de famille entre les deux dynasties sont étroites, depuis le mariage du roi d’Espagne et, malgré certaines petites dissidences à la Cour de