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des débuts du XXe siècle. Logroño, Haro sont aujourd’hui les centres d’un beau vignoble ; des propriétaires ingénieux ont embauché à Bordeaux des spécialistes, ouvriers agricoles et maîtres de chais ; ils ont planté des ceps choisis, après expériences ; leurs vignes sont labourées, sulfatées, soufrées avec cette sollicitude vigilante sans laquelle il n’est point de vin bien venu ; aux bodegas d’antan, où l’on piétinait les grappes dans l’obscurité, ont succédé de vastes bâtimens clairs, aérés, munis d’appareils mécaniques pour le déchargement des charrettes et le pressage du grain ; des voies Decauville circulent entre les fûts « encarassés ; » on exige des livraisons irréprochables des tonneliers et des fabricans de bouchons ; la bouteille est présentée comme celle des crus classés de France, avec une capsule, une étiquette datée, et souvent un léger réseau de fil de fer. Les viticulteurs ont créé des marques spéciales pour divers pays d’Amérique, Cuba, le Mexique ; ils ont conquis d’abord en Espagne une notable clientèle bourgeoise et maintenant produisent pour l’exportation. Le vignoble castillan de Valdepeñas n’est pas encore aussi moderne que celui de la Rioja, mais on aurait tort de croire qu’il n’a pas mieux à offrir qu’un gros vin, plat et violacé, bon tout au plus pour des coupages.


L’essor de tant de richesses nouvelles invite les Espagnols à remanier et compléter le réseau, très insuffisant pour un pays actif, de leurs voies de communication. Il y a peu de routes comparables aux nôtres, en Espagne, sauf dans les provinces où l’effort des budgets locaux porte, depuis longtemps, sur ces travaux de voirie, le pays basque par exemple ; depuis quelques années, la circulation a été fort améliorée le long de la côte cantabrique ; un voyage en automobile n’est plus une aventure, de la frontière de nos Basses-Pyrénées jusque dans les Asturies et en Galice ; Barcelone est le centre de rayonnement de routes qui s’enfoncent plus loin que sa banlieue. Dans les Castilles, en Andalousie, les chemins principaux sont très sommairement empierrés, mais la sécheresse qui règne pendant une grande partie de l’année permet un mouvement assez régulier de messageries et de roulage ; il suffit au voyageur de n’être pas trop pressé et de s’armer de résignation contre la poussière. Les exigences des touristes, envieux de pénétrer dans l’intimité de l’Espagne la moins connue, amélioreront peu à peu la route,