Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 17.djvu/818

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

33e division et le 81e dévalent sur le flanc droit des bleus, tandis que toute l’artillerie rouge reprend son tir ; l’artillerie lourde y joint le sien. L’attaque bleue est arrêtée du coup. Il est midi. Les manœuvres d’armée sont terminées.

Cette fois encore, la bataille a été écourtée pour des raisons étrangères à l’action. Dans la réalité, sur des fronts aussi étendus, elle se prolongerait durant deux journées au moins. On l’a vu au cours des dernières guerres, à commencer par celle de 1870. Les batailles d’Orléans, de Pont-Noyelles, de Bapaume, du Mans, de la Lisaine, n’ont-elles pas duré deux ou trois jours ?


Nous avons montré combien les deux commandans d’armée avaient fait preuve d’initiative et d’esprit offensif. Cette constatation n’a pas échappé aux spectateurs étrangers[1]. Mais ils ont remarqué également que cette initiative n’était pas développée au même degré dans les échelons inférieurs. M. le colonel Guse fait observer avec quelque raison que le succès de quatre divisions bleues sur le 16e corps, le 13 septembre, n’a pas été utilisé comme il aurait dû l’être. Pour M. le général Maitrot[2], le commandement semble sinon absent, du moins lointain. Il en résulte fréquemment du flottement dans les lignes ; on dirait parfois que les attaques n’ont pas d’objectifs bien définis ; elles sont mollement conduites.

On a pu remarquer à plusieurs reprises la très grande extension des fronts. Dans un pays aussi accidenté, se prêtant aussi peu aux communications latérales, cette extension présentait des dangers évidens. Les liaisons étaient souvent mal assurées ; il se produisait dans les fronts de combat de larges brèches qu’un ennemi entreprenant aurait pu utiliser.

En ce qui concerne la troupe, les avis diffèrent sensiblement. Si le colonel Guse souligne sa bonne humeur et son entrain, malgré les fatigues, malgré l’arrivée tardive au cantonnement, malgré les distributions qui se font parfois attendre, le général Maitrot trouve le fantassin « morne et indifférent, » contre toutes les traditions françaises. Il manque aux troupes du Midi, croit-il, « le coup de fouet du voisinage de la frontière. » Le soldat

  1. Notamment le colonel Guse dans la Deutsche Tages Zeitung.
  2. Dans ses correspondances de l’Écho de Paris.