Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 17.djvu/77

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Maria, en union avec vous et la guerroyante et charmante Rosalie ; car au bout du compte nous ne laissons pas d’être guerroyans et charmans. Qu’importent les maladies et les années ! Ces aventures regardent des carcasses et des guenilles qui ne sont pas nous. Nous, nous sommes jeunes, brillans ; nous avons des habits de plus en plus blancs, de plus en plus neufs, et, suivant les pas de notre Christ, nous avançons en chantant vers l’éternelle vie. Qu’il est doux de prier, de pleurer, d’espérer, de sentir que déjà tant d’orages sont passés pour jamais ; que nous ne ferons plus queue à la porte de M. Scribe, que les quinquets ne fumeront plus, que nous ne chanterons plus faux, que tant de vaines attentes sont passées, que nous ne serons plus les jouets de ces néans ! Plus de faux plaisirs, plus de fausses larmes ; nous marchons enfin vers quelque chose que nous ne manquerons pas, que nous ne regretterons pas, que nous ne perdrons pas. Tout ce que Dieu voudra, quand il voudra, comme il voudra. Amen, amen ! et après, l’Alléluia qui ne finira plus. Pensez-vous, chère amie, à ce que nous avons pu désirer de plus beau dans notre ignorance ancienne ? Ce n’était jamais que du Scribe à perpétuité. Grand Dieu, si nous avions été pris au mot, comme déjà nous nous trouverions bêtes ! Le seul souvenir en serait insupportable dans le ciel, il empoisonnerait la béatitude. Mais Dieu a la puissance d’oublier, et il nous communiquera ce privilège. Avec la vie de ce monde, les pardonnes laisseront tout souvenir de la vie. Aussitôt purifiés, nous serons nés de nouveau, nous nous sentirons absolument neufs, absolument purs, nous ne nous souviendrons pas d’avoir rougi. Une joue qui n’aura point porté de fard, des doigts qui n’auront point été tachés d’encre, des lèvres qui n’auront chanté que des paroles de Dieu ! Violette et Luce ne sauront pas que nous avons senti mauvais, et nous non plus, nous ne le saurons pas, et Jésus et Marie eux-mêmes ne le sauront pas.

Ma chère Luce ! je ne l’ai pas vue et je ne la verrai pas de tout le Carême. Hier, j’ai passé auprès de sa porte, j’ai vu le dôme de la chapelle. Rien qu’à cette ombre, je sentais un air plus chaud et plus pur. Il ne faut pas dire que c’est une imagination. Positivement l’air est meilleur là, on s’y porte mieux. Ces maisons où le nom de Jésus se prononce plus et mieux qu’ailleurs, sont de grands ventilateurs qui assainissent l’atmosphère. Si ces maisons tombaient, comme le veulent les imbéciles