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succès il y a trente ans à la construction du tunnel, mais je sais que l’opinion des autorités militaires a bien changé à ce sujet et, comme je l’ai dit plus haut, notre Commission compte un certain nombre d’officiers fort expérimentés.

Nous demandons au gouvernement de défendre le projet sous réserve que les conditions stratégiques seront remplies par les promoteurs.

Je suis persuadé que les ingénieurs du tunnel, lors de leurs pourparlers avec le War Office, seront en état de lui donner satisfaction pour toutes les conditions raisonnables.

Nous ne nous faisons pas les avocats des intérêts de la Compagnie du tunnel, nous désirons simplement que le tunnel soit construit. On a dit que le gouvernement anglais pourrait le construire en collaboration avec le gouvernement français ou en autoriserait la construction par la Compagnie du tunnel aidée des Compagnies de chemins de fer anglaises et françaises.


Au discours de M. Arthur Fell, d’une nouveauté d’idées, d’une hardiesse de langage et d’une ampleur de vue singulières, et à la suite d’une discussion non moins intéressante à laquelle prirent part le colonel Yate, M. Russell Rea, M. O’Connor, M. Parker, sir William Byles, etc., quelle a été la réponse du Premier Ministre ?

Avec la prudence d’un chef de gouvernement, M. Asquith a déclaré qu’il ne peut faire d’emblée table rase de l’opposition, qui, dans les gouvernemens de ses prédécesseurs, a prévalu à la construction du tunnel, si activement poussée de 1875 à 1880 et brusquement arrêtée depuis lors. Le fameux antagonisme de lord Wolseley, le célèbre stratégiste anglais, qui fut l’adversaire le plus déterminé du tunnel au nom de la sécurité de la Grande-Bretagne, est resté dans sa mémoire.


Renoncer, dit-il, à la décision prise par nos prédécesseurs pendant un quart de siècle est un acte qui ne peut être fait à la légère.


Pourtant, il reconnaît aussitôt que la question a changé de face et ses paroles ne sont pas moins dignes d’être relevées que le discours de la députation :


Il y a des faits nouveaux, dit-il, j’en conviens : l’un d’eux, peut-être le plus intéressant et, à certains points de vue, le plus important, est l’établissement sur une base solide et inébranlable de nos relations amicales avec la France. L’ennemi, dans les appréhensions de lord Wolseley et de ceux qui ont adopté son opinion, l’ennemi dont la force défensive et agressive pourrait être aidée par la construction d’un tunnel, était toujours la France. La possibilité d’un pareil ennemi s’est évanouie à la suite des relations excellentes et de plus en plus cordiales que depuis 1904, c’est-à- dire depuis une période de près de dix ans, nous avons maintenues et