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l’Asie ou des plaines de l’Amérique, des hommes, des femmes, des enfans par milliers, par millions, qui, en lisant la Bible, seront guidés, élevés, fortifiés, consolés ; car telle est la force de l’Écriture : le livre est un miracle constant et produit un miracle constant ; il applique, à chacun des actes humains, la poussée de toute l’expérience humaine.


Hérodote est le premier des historiens grecs dignes de ce nom qui soient parvenus jusqu’à nous. Il naquit à Halicarnasse en Asie Mineure vers 480 avant J.-C, et il mourut vers 425 : il vivait au temps de Périclès, de Phidias et de Sophocle, c’est-à-dire à une époque où la Grèce était en pleine maturité intellectuelle, comme s’il eût fallu que cette virilité fût acquise pour qu’elle conçût la véritable « histoire. » Hérodote est, avant tout, un voyageur et un conteur. Chassé de son pays par des discordes publiques, il visite la Perse, l’Assyrie, la Médie, l’Egypte, le Pont-Euxin, la Grèce, bien entendu, et la Grande-Grèce où il s’établit à Thuries, colonie fondée par Athènes, sur l’emplacement de Sybaris et où il mourut. Hérodote eut sous les yeux tous les monumens de l’antiquité dans leur splendeur : la tour de Babel, les pyramides d’Egypte, les temples de Karnak, le colosse de Rhodes, le sanctuaire de Diane à Ephèse, le Parthénon qui s’élevait alors, les monumens de Syracuse, de Sélinonte et d’Agrigente, les temples de Ségeste et de Pœstum, encore debout aujourd’hui et qui nous donnent l’idée de ce que pouvait être, alors, la beauté méditerranéenne. Ce grand voyageur, ému de tant de merveilles, eut la soif de savoir qui avait conçu, créé, développé cette civilisation d’héroïsme, de splendeur et de marbre, soif que nul n’avait eue avant lui et qu’il passa sa vie à satisfaire. Et le même qui sut voir sut écrire : Hérodote est le père de l’Histoire.

La Grèce a donné aux neuf livres d’Hérodote le nom des neuf Muses : pour la Grèce, en effet, toute la tradition intellectuelle était là. Le véritable sujet choisi par Hérodote, ce sont les guerres médiques ; il les considère dans leurs origines, leurs causes lointaines, leurs répercussions sur tout le bassin oriental de la Méditerranée, ce qui l’amène à étendre indéfiniment ses recherches. Par là, les Histoires d’Hérodote servent, en quelque sorte, de suite aux livres homériques. Des deux parts, il s’agit