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REVUE DRAMATIQUE


Comédie-Française : Yvonic, pièce en trois actes en vers, par M. Paul Ferrier. — Théâtre Imprimé : La Délivrance d’Orléans, mystère en trois actes, par M. Joseph Fabre.


La Comédie-Française, qui, en ce mois de septembre encore, n’est plus à la Comédie-Française, mais à Marseille ou à Bruxelles, à moins que ce ne soit en Suisse, a eu la coquetterie, pendant son exode forcé, de monter une pièce nouvelle. Et elle a eu la hardiesse d’en donner la première représentation en plein mois d’août. J’ai beaucoup goûté ce tranquille défi jeté à nos mœurs actuelles et ce rappel discret de la tradition. Car l’usage de fuir Paris dès les premiers beaux jours est de date assez récente, et c’est nous, gens de maintenant, qui avons fait de notre ville, pendant la saison chaude, un lieu inhabitable ou du moins inhabité. Jadis on ne regardait pas au calendrier pour monter un ouvrage : plusieurs des tragédies de Voltaire ont été jouées pour la première fois pendant l’été, qui était aussi la saison des plus brillantes solennités académiques. Que dirait aujourd’hui celui des Quarante à qui on proposerait de le recevoir vers le milieu d’août ? Ce n’est pas que le Parisien d’autrefois n’aimât, comme un autre, à goûter l’ombre et le frais : le Parisien a eu de tout temps l’âme champêtre. Mais d’abord Paris était tout plein de jardins ; puis, autour de Paris il y avait ces charmans environs de Paris, auxquels nous avons substitué la banlieue, la hideuse banlieue. Où ne poussent maintenant que des gares et des tuyaux d’usines, c’étaient des nids de verdure où le beau monde avait sa maison des champs. De Saint-Denis et de Saint-Ouen, ou tout simplement d’Auteuil, on venait à la pièce nouvelle, et comme le théâtre finissait de bonne heure, on s’en retournait le soir, dans les amples voitures propices à la conversation, tout en devisant