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seul instant ; il faudrait supprimer les dirigeables et constituer entièrement notre flotte aérienne d'aéroplanes. Ces derniers appareils sont en effet beaucoup moins coûteux, moins encombrans, plus maniables, et immobilisent pour leur manœuvre à terre un personnel beaucoup plus restreint. À qualité égale, ils sont donc, à tous égards, d'un emploi beaucoup plus pratique.,

Malheureusement, si, au point de vue de la vitesse et de l'altitude, la supériorité appartient aux aéroplanes, il n'en est pas de même en ce qui concerne le rayon d'action. Sous ce rapport les dirigeables sont préférables, et de beaucoup. Tandis qu'avec les aéroplanes on ne peut guère compter sur plus de 300 kilomètres de rayon d'action, l'expérience de chaque jour prouve que les dirigeables peuvent facilement acccomplir des parcours de 600, de 1 000 kilomètres, et même davantage, sans reprendre le contact du sol. C'est là une qualité précieuse qu'ils possèdent seuls, et c'est pour cela qu'il est indispensable, malgré leur prix élevé et leurs inconvéniens pratiques de toute nature, d'en avoir un certain nombre dans notre flotte aérienne.

Je ne rappelle que pour mémoire les avantages d'ordre secondaire qu'offrent les dirigeables : installation plus confortable, plus grande facilité pour employer la télégraphie sans fil, possibilité de voyager de nuit, sensibilité moins grande aux caprices du vent, etc.

Ainsi, nous devrions bien comprendre, une fois pour toutes, que notre flotte aérienne doit se composer d'aéroplanes et de dirigeables ; ces derniers en nombre beaucoup moindre, destinés exclusivement aux grandes reconnaissances stratégiques, et en général aux opérations exigeant un grand rayon d'action.

Cette vérité n'est pas nouvelle : la question se pose, de la même manière, depuis plusieurs années; et, néanmoins, on paraît ne pas l'avoir suffisamment comprise en haut lieu, puisque, tandis que nous poussions avec activité au développement de l'aviation militaire, nous faisions des efforts beaucoup moindres en ce qui concerne nos dirigeables de guerre. Cela semble une aberration inexplicable; on peut néanmoins trouver, sinon des excuses, du moins des circonstances atténuantes.

Toutes les personnes un peu au courant de la navigation aérienne savent, en effet, que, depuis son apparition, l'aviation a progressé d'une façon extraordinaire. C'est en 1908 qu'elle a triomphalement révélé son existence; dès le début, les