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Joubert se trouve ainsi très nettement définie. Il est novice. Commence-t-il ou continue-t-il, le 17 septembre 1772, son noviciat ? Le texte ne semble point assez rigoureusement rédigé pour que, dans cette alternative, on choisisse avec assurance. Mais il est novice. Or, les balottes ne montraient pas une extrême indulgence ; et il suffit de parcourir le registre du P. Castaing pour y découvrir nombre de confrères que l’assemblée de la communauté renvoya. Auprès du nom de Joseph Joubert, en marge, il y a ces mots, de la main du P. Castaing : « il s’est retiré. » A quelle date s’est-il retiré ? Le P. Castaing ne le dit pas. Mais le registre des vêtures signale une balotte qui fut tenue le 21 avril 1773. Plusieurs camarades de Joubert, — et, par exemple, Drouailhes et Coralx, — sont admis à la prolongation de leur noviciat. Joubert, non : il n’est pas question de lui.

Je conjecture que Joubert, novice dans le second semestre de l’année 1772, s’est retiré avant le 21 avril 1773.

A-t-il quitté alors les Doctrinaires ? Non pas. J’ai sous les yeux un petit feuillet écrit par lui et qui, de sa main, porte cette mention : « En 1774. A l’Esquille. » Donc, en 1774, et c’est-à-dire une année au moins après qu’il eut abandonné le noviciat, Joubert était encore aux Doctrinaires.

Sans doute s’est-il retiré du noviciat au moment où il lui aurait fallu faire profession, prononcer les trois vœux de pauvreté (non qu’il aimât les richesses), de chasteté (non qu’il fût bien concupiscent), d’obéissance (non qu’il eût le goût de la révolte), et promettre de rester dans la congrégation tout le temps qu’il vivrait. Pourquoi se retira-t-il ? Peut-être sa frêle santé ne se prêtait-elle point aisément à la règle assez dure des levers matinaux, des fréquens offices et à la discipline de couvent qui réclame une vive énergie du corps. Peut-être avait-il déjà cet amour d’une liberté, certes casanière, mais qui s’impose elle-même ses bornes. Et peut-être, à la veille de s’engager, éprouva-t-il les scrupules d’une certaine incertitude dogmatique : on l’admet volontiers, quand on sait que bientôt les philosophes de Paris le séduiront. Peut-être même le petit novice fut-il touché de quelque velléité mondaine. Sans doute y eut-il, dans les motifs de sa retraite, un peu de tout cela ; et tel est, en somme, notre cœur : il se décide rarement pour une seule raison.

Mais Joubert, qui se retirait du noviciat et qui, sans avoir