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villa ? Est-ce, comme on me l’assure, à Casciago, près de Varèse, qu’il se reposa « de l’été brûlant du siècle ? »


Varèse !... Les beaux arbres ! C’est cela surtout, cette beauté des arbres, qui me frappe et m’enthousiasme, en arrivant. Les gens du Nord, habitués aux splendeurs végétales de leurs parcs, ne partageront pas, je le crains, mes admirations. Mais, au sortir de la Riviera, calcinée par le soleil caniculaire, on s’étonne devant cette opulence des feuillages et cette opacité des ramures. Sur ces premiers escarpemens des Alpes, où il fait, tour à tour, très froid et très chaud, toutes les essences peuvent s’acclimater. Le Nord et le Midi sont réconciliés. Voici des palmiers nains, des cyprès, des thuyas, des cèdres pêle-mêle avec des sapins, des platanes, des trembles et des peupliers...

La route qui conduit de Varèse à Casciago est tout ombragée de ces beaux arbres. Bien que le soleil soit encore très haut dans le ciel, — il est à peine quatre heures du soir, — on y éprouve une impression continuelle de fraîcheur : c’est la profusion des verdures sans doute, l’éclat velouté des prairies qui en donnent l’illusion. Mais, par instans, cette fraîcheur est très réelle. Un courant d’air, venu des montagnes couvertes de neiges, vous caresse la figure et vous épanouit la poitrine. On se sent vraiment dans un pays d’ombrages, de nonchaloir, de repos. Les auberges qui bordent la route portent des enseignes significatives : Ristorante della pace, Osteria della quiète : Restaurant de la paix. Estaminet du repos. J’aperçois, au pas- sage, le portail d’un collège, qui s’intitule mêmement : Collegio della quiete, Collège du repos, — un nom bien engageant pour les petits collégiens !... Au-dessus de l’entrée, une fresque naïve, peinte de couleurs claires et joyeuses, représente le repos de la Sainte Famille : la sainte Vierge, saint Joseph et l’Enfant Jésus étendus et dormant sous un palmier, auquel l’âne est attaché. Ces enluminures ajoutent à la gaîté tranquille et voluptueuse du paysage. Elles y mettent une pointe de sensualité italienne. Mais c’est l’impression de fraîcheur et de repos qui domine. Augustin, fatigué dans son corps, l’âme brisée par les luttes de sa conversion récente, no pouvait trouver une retraite plus propice. Tout ce qu’il cherchait, il l’aurait, ici, avec