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doute que des fragmens détachés de la Grande-Barrière de Ross dont nous avons parlé récemment à propos de la découverte des pôles. Il est démontré en effet que, sur des étendues immenses, la Grande-Barrière ne repose pas sur le sol, mais flotte en équilibre instable à la surface de l’Océan.

Dans l’Atlantique et dans la partie orientale de l’Océan Indien les icebergs antarctiques atteignent 45° de latitude Sud, et seulement 50° dans le Pacifique. Mais il semble que leur limite soit rejetée un peu plus vers le Sud, à la pointe méridionale de l’Amérique, et vers le Nord à l’extrémité de l’Afrique.


On a proposé depuis quelques mois beaucoup de moyens pour diminuer les périls résultant de la dérive des icebergs qui menacent les vaisseaux sur la route de New-York. On a préconisé l’entretien d’une flottille qui croiserait continuellement dans les parages dangereux et avertirait les navires par la radiotélégraphie[1] et divers autres procédés dont aucun n’est encore entré dans la pratique. A l’heure actuelle un navire n’a réellement d’autres moyens d’éviter les glaces flottantes que ceux qu’il porte en lui-même, et par-dessus tout l’attention ininterrompue des hommes de vigie. Mais lorsque le brouillard, si fréquent dans la région terreneuvienne, entoure le vaisseau d’un mur opaque à la lumière, ne reste-t-il pas d’autres planches de salut que de s’en remettre à la grâce de Dieu, ou de diminuer, d’annuler presque la vitesse du navire ? Les gens qui ne sont pas fatalistes admettront difficilement la première manière ; quant à ceux qui sont pressés d’aller à leurs affaires, — et c’est le cas de presque tous les passagers des transatlantiques, — ils n’admettront pas du tout la seconde.

M. Barnes, professeur à l’Université de Montréal, vient de donner aux uns et aux autres un espoir, grâce aux expériences remarquables qu’il poursuit actuellement dans l’Atlantique occidental. M. Barnes a fixé aux flancs du navire sur lequel il opère un microthermographe, c’est-à-dire un thermomètre enregistreur ultra-sensible qui indique

  1. En ce moment même un vaisseau frété par le Board of Trade des principales compagnies transatlantiques, le Scotia, ancien navire de l’expédition antarctique écossaise, fait une campagne dans la région de Terre-Neuve à l’effet de recueillir le plus de renseignemens possibles sur les icebergs. Il est muni d’une installation de télégraphie sans fil à longue portée, et compte dans son état-major plusieurs savans éminens. Nul doute qu’il n’apporte bientôt des résultats fort importans.