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En 1211, Willebrand d’Oldenbourg trouve ses défenses peu importantes et ce n’est, d’après le Père de Lusignan, que sous le règne d’Henry II, de 1285 à 1324, et surtout vers 1310, époque à laquelle la ville était au pouvoir de son frère l’usurpateur Amaury, qu’on acheva ses fortifications[1], complétées seulement sous Pierre II en 1372.

En 1394, N. de Martoni[2] écrit : « La ville a des remparts plus beaux que je n’en ai vu nulle part ; ils sont élevés et offrent sur tout leur circuit de larges boulevards et des tours hautes et massives. Jour et nuit les Génois gardent avec soin la cité par peur du roi de Chypre ; ce soin est assuré avec une grande discipline par sept cents soldats à la solde des Génois. » Ces boulevards n’avaient cependant alors que cinq pas de largeur, les tours quatre pas de diamètre. Et il ajoute : « Le fort est assez beau et presque en entier dans la mer, à l’exception d’un quart du côté de la ville ; dans ce quart, il y a de beaux fossés de part et d’autre, que remplit l’eau de la mer.

Ces remparts, qu’admirait Martoni, n’ayant plus de valeur militaire au XVe siècle à cause des progrès de l’artillerie, il fallut les reconstruire, et ce que nous voyons aujourd’hui est l’œuvre des Vénitiens.

Ils ont été édifiés entre 1492 et 1544. En 1518, Le Saige, de Douai[3], en fut émerveillé : « Les murailles de Famagouste, écrit-il, sont toutes nouvelles ; il y a boulleverre bien exquis. Pour faire court c’est une ville imprenable, si il y avoit garnison souffisante. Mais il n’y a que huit cens soudards que paient les Venissiens. »

Il est assez curieux de noter, en passant, que 7 à 800 soldats formèrent, pendant toute la durée de l’occupation latine, la garnison ordinaire de Famagouste, car nous retrouvons ce même nombre d’hommes dans le récit du siège de 1571, du frère Ange Calepin[4] ; à ce nombre il faut cependant ajouter 200 Albanais et 3 000 citoyens ou villageois, sans doute des réfugiés venant de la campagne.

Ce siège, le dernier que la ville, bombardée jour et nuit (elle

  1. Enlart, l’Art gothique et de la Renaissance en Chypre, t. II, p. 606 et suiv.
  2. Pèlerinage à Jérusalem, 1394. Revue de l’Orient latin, 1895, t. III, p. 617-628.
  3. Jacques Le Saige, de Douai, p. 135.
  4. Description et histoire de Chypre, par le Père E. de Lusignan, 1580. — Récit de la prise de Famagouste, par le frère A. Calepin, de Cypre, de l’ordre de Saint-Dominique, p. 272.