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déroute un peu, mais l’œil s’y fait et cesse rapidement d’en être surpris.

Sur la façade et particulièrement sur le côté sud de l’église, on voit des traces de boulets tirés par les Turcs probablement pendant le siège de 1571. Or, en examinant le plan de Gibellino, publié à Brescia la même année, qui donne l’emplacement des batteries musulmanes et en mesurant les distances, sur le terrain, on arrive à cette conclusion, qu’à cette époque les bouches à feu avaient déjà une portée considérable.

L’intérieur de Saint-Nicolas est d’une grande beauté et d’une extrême simplicité : simplicité rendue plus saisissante encore par l’absence de statues et d’autels, par la blancheur éclatante du vaisseau. Avant sa transformation en mosquée elle devait être entièrement peinte, mais la religion musulmane défendant la représentation des figures humaines, les Turcs ont passé, sur l’ensemble, une épaisse couche de lait de chaux. Douze colonnes rondes, puissantes, six de chaque côté, partagent la nef en trois parties. Les chapiteaux également ronds, sans ornemens, soutiennent les arcades à double voussure et, tout en haut, des clefs de voûte sculptées en feuillage complètent l’édifice.

De ces richesses d’autrefois il ne reste plus, dans la cathédrale, que deux beaux candélabres, hauts de plus de 1m, 50, en fer forgé du XIVe siècle, ornés de feuilles et de fruits de figuier et de poirier. Tout le reste, y compris les vitraux, a été brisé ou emporté.

Dès le 3 août 1300, écrit M. Enlart, les travaux de construction de Saint-Nicolas devaient être commencés. En 1308, l’évêque Guy laissait, pour l’œuvre de la cathédrale, une somme de 70 000 besans, stipulant que son successeur n’en aurait la disposition que sous le contrôle du chapitre ; mais ce successeur, Antonio Saurona, détourna une partie des fonds. Le 4 août 1311, d’après une inscription qui se lit sur l’un des contreforts du côté sud, on n’avait terminé que les absidioles avec les deux travées qui les précèdent. Heureusement que Baudouin Lambert, élevé au siège épiscopal de Famagouste, rouvrit, le 1er septembre de la même année, à ses frais, les chantiers, et qu’à partir de ce moment, les travaux furent rapidement poussés. Vit-il l’achèvement du monument ? Nous ne le savons pas avec certitude.

A droite du parvis et attenant à la cathédrale, bordant la