Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 16.djvu/105

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

hommage au parti socialiste pour son irréductible opposition. » Suivent des « ordres du jour » du 91e d’infanterie (Mézières-Charleville), du 87e (Saint-Quentin), de la 24e section, etc.

Voici quelques échantillons des protestations publiées par l'Humanité : « La garnison de Mézières-Charleville (qui comprend le 91e d’infanterie et un groupe du 61e d’artillerie), confiante dans le vaste mouvement de protestation contre la loi de trois ans, envoie au parti socialiste, à ses élus et aux syndicats ouvriers ses plus sincères remerciemens ; invite le gouvernement à se rendre compte de ce qui se passe dans les casernes ; et lui certifie que, si les voix de la classe ouvrière ne font pas assez de bruit à son gré, les hommes sous les drapeaux pourraient bien y joindre une autre voix plus grande en force et plus tragique en effet. Nous comptons sur les élus socialistes et sur le concours de l'Humanité, dont nous sommes presque tous lecteurs, pour ne pas laisser s’accomplir un tel acte. »

La publication continue les jours suivans. Le numéro de l’Humanité du 24 avril contient encore une longue liste de soldats répondant à l’appel de la C. G. T. Toutefois, pour éviter les sanctions, le numéro du 2 mai recommande aux soldats de ne pas signer. « Les soldats n’ont pas à signer la pétition. Mais qu’ils conseillent à leurs parens, à leurs amis de la signer. Qu’ils nous donnent au besoin des adresses pour envoyer des listes. »

La communication avec les soldats est donc établie par correspondance directe. Mais on utilise d’autres moyens encore. Bientôt, en effet, ce sont les réservistes et les territoriaux, introduits dans les casernes par leurs périodes d’instruction, qui deviennent les propagateurs de l’appel à la révolte. L’Humanité écrit : « Un de nos braves camarades syndiqué et membre du parti, le citoyen F. Schwob, a été appelé le mois dernier au 157e territorial pour y accomplir sa période de neuf jours. Pour avoir distribué des listes de pétition contre la loi de trois ans, il a été frappé de huit jours de prison par le colonel, portés à quinze par la brigade et à soixante par le général en chef. Ces messieurs ne veulent pas s’arrêter là et le dossier aurait été envoyé au ministère de la Guerre pour y être examiné. Cette mesure odieuse, qui ne se justifie que par la peur de nos réacteurs de voir échouer leur loi de trois ans, a provoqué dans les milieux ouvriers une émotion considérable. »