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syndicats devront dresser une liste de leurs membres au régiment avec toutes les indications utiles. Le double de cette liste devra être envoyé au secrétariat de la section des Bourses de la G. G. T. Le secrétaire de cette section devra à son tour adresser une liste des soldats syndiqués répartis par centre et par région et adresser cette liste aux Bourses du travail intéressées. Les soldats sont invités à fréquenter les Bourses du travail. Les secrétaires des Bourses auront à viser les cartes confédérales des soldats. » Ce sont les listes de recrutement de la révolution.

Aussitôt les mesures d’exécution commencent et les circulaires partent. L’Union des Syndicats de la Seine précise dans l’une d’entre elles, en date du 14 mai 1911, qu’il s’agit d’appliquer « les décisions (des congrès) sur l’antimilitarisme : » nous voilà loin de la mutualité. Les envois de mandats aux soldats sont en conséquence accompagnés de commentaires. La Bourse du travail de Bourges leur parle de « leur vilain métier » et leur écrit : « Tu ne tueras pas. » On pourrait multiplier ces citations. Retenez que nous sommes alors en plein conflit franco-allemand. C’est le moment que prend un syndicat pour écrire aux soldats qu’il subventionne : « Sachons choisir nos ennemis, qui ne sont pas certes les ouvriers allemands, mais nos maîtres de quelque pays qu’ils soient. » Ou encore : « Inutile que nous t’indiquions la cible. »

À la même époque, nouveau pas en avant : le Sou du Soldat avait été jusqu’alors laissé à l’initiative des syndicats. Sous l’impulsion de M. Yvetot, les Bourses du travail commencent à s’en saisir, substituant au Sou syndical, nécessairement limité, un Sou plus largement assis. Sous la même impulsion, les Fédérations, plus libres de leurs mouvemens que les Bourses, puisqu’elles ne reçoivent pas de subventions, entrent en scène.

La Fédération de la Métallurgie, la Fédération des Transports par voie ferrée, la Fédération Nationale du Bâtiment sont à la tête du mouvement destiné à créer le Sou fédéral. Le but ? M. Lenoir le révèle en écrivant dans la Bataille du 22 octobre 1911 : « Si le Congrès a affirmé son sentiment antimilitariste, il a su matérialiser sa pensée en consentant l’effort pécuniaire, etc. » Cet effort pécuniaire est déclaré obligatoire pour tous les syndiqués : il a commencé à se produire le 1er jan-