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n’a pas craint d’affirmer que là était le rôle principal de la cavalerie. Cet orateur a étonné tout le monde et n’a convaincu personne. Que la mission de la cavalerie divisionnaire soit nécessaire, importante et difficile, ce n’est pas contestable. Mais que cette mission soit le rôle principal de la cavalerie, on ne peut le soutenir qu’en perdant de vue le rôle essentiellement offensif de la cavalerie et en la réduisant à un rôle défensif contre lequel protestent, aussi bien les glorieuses traditions de l’épopée, que tous les enseignemens des guerres modernes. Ce qui est vrai, c’est que toute cavalerie doit savoir, à un moment donné, remplir le rôle de cavalerie divisionnaire et que les escadrons des divisions indépendantes doivent y être préparés aussi bien que les escadrons de la cavalerie de corps. N’arrivera-t-il pas constamment à la guerre qu’un escadron sera prélevé sur n’importe quel corps de cavalerie pour servir de cavalerie divisionnaire à une unité d’infanterie qui s’en trouvera dépourvue ? Cette mission durera plus ou moins longtemps suivant les circonstances, de même que celui de soutien de l’artillerie, qui peut durer seulement pendant une phase de la bataille ? Il en est ainsi constamment aux manœuvres et dans les exercices de garnison, tout simplement parce qu’en fait un régiment appartenant à la cavalerie endivisionnée se trouve le plus à proximité de l’unité d’infanterie qui en a besoin. Mais c’est là un rôle exceptionnel et qui d’ailleurs sera toujours d’autant mieux rempli que la troupe de cavalerie qui en sera chargée sera de meilleure qualité, aura une plus grande habitude de voir loin et bien, possédera des chevaux et des cavaliers plus adroits, plus résistans et mieux entraînés. Si le rôle de la cavalerie divisionnaire est en général moins brillant que celui de la cavalerie indépendante, il est en revanche singulièrement pénible, ne serait-ce qu’à cause du manque d’habitude des chefs d’infanterie à manier une arme qui n’est pas la leur et de leur tendance à lui demander des efforts qui quelquefois dépassent ses moyens. Nous croyons qu’aucun cavalier ne nous démentira quand nous affirmerons qu’on trouvera toujours la meilleure cavalerie divisionnaire dans la troupe la plus complètement cavalière.

C’est donc, à notre avis, une erreur de croire que la cavalerie destinée à être cavalerie divisionnaire doive recevoir une instruction spéciale et constituer pour ainsi dire une autre cavalerie que la cavalerie endivisionnée.