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preuve, — une solution nouvelle à l’un des problèmes les plus importans de l’agriculture.

Pour être complet, je devrais ajouter qu’en outre de ses deux principaux constituans, l’air atmosphérique contient encore les gaz rares récemment découverts : l’argon, le crypton, le néon, le xénon et le métargon ; malgré leur extrême dilution, il est possible, par distillation fractionnée de l’air, de les en extraire à l’état pur et en notables quantités. M. Claude a découvert que l’un d’eux, le néon, — dont la rareté est telle qu’il n’en existe qu’un litre dans 65 000 litres d’air, — a la propriété singulière de se laisser traverser avec une facilité extraordinaire et exceptionnelle par la décharge électrique. Là où il faut 1 000 volts dans le cas de l’air, il suffit de 13 volts dans le cas du néon. Aussi les « tubes à néon, » où l’on produit la luminescence électrique de ce gaz, et dont les Parisiens peuvent dès maintenant admirer en divers endroits la belle et calme lumière rouge, constituent une solution nouvelle et élégante du problème de l’éclairage économique.

Il s’est trouvé dans la fabrication de ces tubes une petite difficulté qui, génératrice d’ingéniosité, a donné à M. Claude l’occasion d’appliquer une autre propriété très curieuse des basses températures. La difficulté, est la suivante : la magnifique luminescence du néon se laisse masquer avec une déplorable facilité par la présence de traces infimes de gaz étrangers. C’est ainsi que, si même on introduit dans le tube luminescent du néon parfaitement pur, le-vif éclat dont il brille au premier instant tombe à presque rien en un moment, à cause des petites impuretés que les électrodes dégagent au passage du courant. Il importait donc de trouver un moyen d’absorber au fur et à mesure ces impuretés jusqu’à ce que les électrodes ne dégagent plus rien. On y est arrivé en utilisant la remarquable propriété, découverte par le professeur Dewar de Londres, et que possède le charbon, d’absorber les gaz avec une extrême énergie lorsqu’il est refroidi à la température de l’air liquide. Mais les gaz sont d’autant plus facilement absorbés ainsi par le charbon qu’ils sont plus aisément liquéfiables. Les tubes à néon sont pendant leur formation munis de tubulures latérales, qu’on en séparera au chalumeau, l’opération terminée, qui renferment du charbon et sont plongées dans l’air liquide. Le charbon absorbe donc au fur et à mesure les impuretés dégagées et laisse le néon peu liquéfiable.

Pour donner une idée de cette étonnante propriété pneumatique du charbon refroidi dans l’air liquide, il nous suffira de dire qu’on peut, par ce procédé, amener en quelques minutes dans un tube de Crookes une pression initiale d’un millième à être réduite à un dix-millionième