Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 13.djvu/702

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelques Français éclairés comme M. d’Arsonval, M. André Lebon, M. Gariel, a pris l’initiative de congrès internationaux et nationaux où ces problèmes sont étudiés. Au premier congrès international du froid réuni il y a quatre ans à peine à Paris, six mille congressistes et quarante-cinq États avaient répondu à l’appel venu de la France. Le congrès national réuni, il y a quelques semaines à peine à Toulouse, a montré tout le chemin parcouru depuis lors.

Son premier soin a été de définir les unités et appellations nouvelles qu’imposent les emplois de plus en plus nombreux du froid. La plus essentielle, et qui ne tardera pas sans doute à entrer dans le langage courant, est la « frigorie. » — On sait que l’unité de chaleur, la « calorie, » est la quantité de chaleur qu’il faut communiquer à une masse d’eau de 1 kilogramme pour élever sa température de zéro à 1°. Eh bien ! la « frigorie » est exactement l’inverse. Par exemple 1 kilogramme de glace à 0° fournit en fondant 80 « frigories, « c’est-à-dire qu’elle soustrait 80 « calories » au milieu ambiant.


Parmi les industries du froid, il n’en est sans doute pas qui, nées il y a quelques années seulement, aient pris depuis peu un essor plus brillant et plus fécond que celle de l’air liquide. Ce résultat est dû pour la plus large part aux travaux d’un jeune et éminent savant français, M. Georges Claude. J’ai indiqué, dans ma dernière chronique, au prix de quelles difficultés et après quels tâtonnemens, Cailletet avait réussi à produire par refroidissement et détente les premières gouttelettes d’air liquide. Le mérite de M. Claude est d’avoir su rendre industriel, c’est-à-dire économique et simple, ce qui n’était qu’une expérience difficile de laboratoire. Grâce à des procédés aussi ingénieux que savans, que mes lecteurs me pardonneront de ne leur pas exposer ici, c’est par hectolitres que coule maintenant l’air liquéfié dans les usines, qui dans le monde entier appliquent ces procédés français.

Une remarque s’impose : pour liquéfier l’air à 190° au-dessous de zéro, il faut, comme nous l’avons vu, le comprimer d’abord puis le détendre. Mais cette compression exige une dépense de travail mécanique qui devra être fourni à l’appareil frigorifique. Dans le cas où on ne dispose pas d’une chute d’eau, il faut donc utiliser une machine à vapeur qui fonctionne sous l’influence de la chaleur dégagée par la combustion du charbon dans le foyer. De telle sorte qu’on arrive à ce résultat, en apparence paradoxal, que la principale dépense courante