Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 13.djvu/671

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

imposa la sienne. Le sang germanique prédomina dans le tempérament des populations rivées à un sol ingrat, bas et soumis aux vents maritimes, il ne fit qu’influencer le tempérament des populations groupées dans les vallées fertiles, protégées par les renflemens d’un sol dur et pierreux. Il n’y aurait donc point, entre le Flamand et le Wallon, une vraie différence de race, car ils sont de la même famille celtique, mais, dès leurs origines, au IIIe siècle, ils ont été diversement impressionnés par l’afflux germanique qui se heurte et se mêle en Belgique avec l’afflux latin. Et, déjà, ce mélange ou ce heurt subissait la complicité mystérieuse et implacable d’un sol qui, lentement, allait pétrir les membres et déterminer la sensibilité de ses habitans à travers les siècles.

Le fond commun, ce fond celtique des Occidentaux, fait de ténacité et d’énergie, de persévérance et de particularisme, le voici allié, d’une part, au farouche tempérament des barbares que le christianisme n’arrivera jamais à adoucir complètement, de l’autre, influencé par la civilisation romaine déjà anémiée par la décadence, mais encore pénétrée de discipline, d’idéalisme et de vertu civique, merveilleusement appropriée par le christianisme. Le sol, les alimens qu’on lui fera produire, vont modeler deux types physiques différens, et la langue traduira, conformément au vœu composite de la race modifiée, mélangée, une sensibilité presque contradictoire.

Nous n’avons pas à suivre ici, au gré des événemens historiques, l’évolution du mélange ethnique. Nous y reviendrons un instant tout à l’heure, quand nous dégagerons les fondemens d’une conscience nationale moderne. Mais l’importance des origines ne nous échappera pas, car c’est vers elles que se reporte aujourd’hui le Belge soucieux de son originalité. Le passé n’est digne d’influencer le présent que s’il offre une explication plausible des qualités foncières d’un peuple.

Or, avant même de toucher le sol de la Belgique, si l’on arrive par la mer, on découvre la raison du grand silence laborieux dans lequel vivent les populations de la Flandre basse. Ce territoire sablonneux, envahi, puis abandonné par la mer, sous lequel on trouve la tourbe des anciens marais, ne nourrit une population extrêmement prolifique qu’au prix d’une lutte incessante contre vents et marées. La vaste plaine, qu’elle soit, — comme aux environs d’Ostende, de Nieuport, de Dixmude, — presque