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que leur avait donné, avant leur départ, la mère-Flandre.

C’est que les régions de la Belgique ont un caractère extrêmement marqué et c’est que le peuple a, avec elles, des analogies, résultant d’une longue cohabitation ancestrale. Quelque active et tumultueuse qu’ait été leur histoire, nos provinces ont gardé une population sédentaire. Les monumens de nos villes, s’ils attestent une tradition d’indépendance et de ferveur, disent surtout l’habitude qu’ont eue les habitans de borner l’horizon aux limites de leur ombre.

Le milieu physique a donc, dans la physionomie du Belge, une importance considérable et il convient que nous en dégagions quelques exemples.

On peut, à première vue, distinguer en Belgique un double aspect naturel. Si l’on traverse, ne fût-ce qu’en chemin de fer, le pays d’Ostende à Arlon, ce qui est le plus long trajet ferré, on suit la transformation de la terre et du paysage depuis la mer jusqu’aux hauts plateaux ardennais, et l’on peut se dire qu’à chaque différence du sol, correspond une différence des gens.

Les ethnographes, qui sont des savans, déclarent abusif de diviser le peuple belge en deux races distinctes d’origine, et ils ramènent la distinction entre Flamands et Wallons à une question de conquête romaine. Mais celle-ci est dominée, précisément, par la nature de la terre conquise et convoitée et ainsi, au plus lointain du passé, ce qui devait devenir la Belgique a subi la loi de son sol.

En effet, après la conquête de la Gaule par César qui les avait d’ailleurs imparfaitement romanisées, toutes nos provinces résistèrent différemment aux invasions germaniques. Les districts du Nord, ceux que séparait des autres l’immense forêt charbonnière qui coupait tout le pays de l’Est à l’Ouest, furent facilement atteints et pénétrés, tandis que ceux du Sud gardèrent l’empreinte latine. Et les premiers, incultes, à peine défrichés de-ci, de-là, par des établissemens militaires, furent abandonnés facilement aux envahisseurs par la puissance romaine, tandis que les seconds, où de véritables colonies, ces villas gallo-romaines, savamment organisées et administrées, avaient été établies, demeurèrent en relations avec la civilisation du Sud.

Ainsi, lorsque tout le pays fut devenu terre franque, le Nord subit l’impression du vainqueur barbare, tandis que le Sud lui