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des instructions. Deux dépêches successives de Mocenni les apportaient. Galimberti avait mission d’obtenir que Bismarck, devant les Seigneurs, articulât quelques mots formels, énergiques, en faveur des amendemens Kopp ; et il avait mission de faire savoir aux catholiques de la Chambre des Seigneurs ce que le Pape désirait. Même au cas où le gouvernement modifierait un peu le texte des amendemens, mais non leur « substance, » ces catholiques devraient voter la loi, en déclarant préalablement que l’avenir apporterait des améliorations plus propices encore à la liberté de l’Eglise, et en faisant des réserves sur la question des biens ecclésiastiques, laissée de côté par le projet de loi. « La paix religieuse obtenue en Prusse, ajoutait expressément Mocenni, est connexe à la paix européenne. »


III

Ce fut le 23 mars 1887 que les Seigneurs commencèrent la discussion, et Mgr Kopp prit aussitôt la parole. Le premier mot de l’évêque était un merci, très optimiste, très cordial, pour la loi de 1886, et pour le projet nouveau dont on voulait faire une loi. Il traçait un tableau riant des facilités déjà rendues à l’Eglise : il déclarait que celles qu’on lui offrait encore étaient des concessions précieuses et dignes de reconnaissance, qu’ainsi devaient les juger les catholiques, qu’ainsi les jugerait le Saint-Siège. Cependant certains désirs et certaines attentes subsistaient, dont il devait se faire l’interprète ; et la tâche qu’il allait assumer était en partie, il le déclarait formellement, une mission du Saint-Siège. Alors, tour à tour, le prélat défendit ses amendemens. Il parla sans hauteur, sans arrogance ; un quart d’heure durant, il esquissa l’apologie des ordres religieux ; s’adressant à des collègues étrangers pour la plupart à l’esprit du catholicisme, il sut approprier ses pensées, son langage, de façon à leur faire comprendre, sinon accepter, ces institutions de l’ascétisme catholique. Il avait des argumens qui frôlaient, qui s’insinuaient, qui ne faisaient pas effraction ni violence ; qui n’avaient rien de despotique, rien d’absolutiste ; l’idée même chez lui, et les mots à plus forte raison, détestaient les dehors anguleux, évitaient l’allure impérieuse. Il affectait de laisser voir une confiance sereine dans les intentions de l’Etat ;