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On parle encore d’autres candidats, et nous ne voulons pas paraître ignorer l’un d’eux. M. Pams, dont le nom a rencontré une certaine faveur. M. Pams est ministre de l’Agriculture ; sa personne est très sympathique ; mais il n’a joué jusqu’à présent aucun rôle politique important, et il serait difficile de donner à sa candidature un caractère un peu précis. On répète volontiers, dans les conversations et dans les journaux, que la tendance des Chambres est d’élire à la présidence de la République un homme honorable, mais effacé, sur la docilité ou même sur la soumission duquel on compte pour la suite. Il faut bien reconnaître que nos présidens, par la manière dont ils ont compris et exercé leur magistrature, ont donné quelque créance à cette opinion. Ils ont cru qu’étant les arbitres des partis, ils devaient planer dans une région supérieure où leur personnalité est devenue un peu indistincte. Mais avant d’être présidens de la République, ni M. Fallières, ni M. Loubet, pour ne citer que les deux derniers, n’avaient été des hommes politiques et parlementaires sans relief. Doués l’un et l’autre d’un talent de parole très réel, ils avaient su faire effet sur les assemblées ; ils avaient été plusieurs fois ministres ; ils avaient été présidens du Conseil ; ils avaient été présidens de la Chambre ou du Sénat. Il n’est donc pas vrai qu’on les avait choisis parce que, n’étant jamais sortis de la pénombre parlementaire, on comptait qu’ils conserveraient à l’Elysée la couleur un peu terne qui plaît aux yeux de nos radicaux. A la vérité, ils n’y ont jeté qu’un éclat atténué, se contentant de remplir leurs fonctions avec une grande probité politique, sans prendre une part personnelle aux affaires. Il semble bien, aujourd’hui, que l’opinion générale désirerait que le Président de la République jouât un rôle plus apparent. Sans doute il ne doit pas se substituer à ses ministres, et, le voulût-il, il ne le pourrait pas, puisqu’il ne peut rien faire sans le contre-seing d’un d’entre eux. Les ministres ayant la responsabilité devant les Chambres doivent avoir la réalité du pouvoir. Si le Président de la République réussissait, par nous ne savons quel procédé, à s’en emparer pour lui-même, à son tour il deviendrait responsable et ne durerait pas plus que ne le font les Cabinets. Ce n’est évidemment pas ce qu’a voulu la Constitution, qui lui a attribué une durée septennale. Placé entre des devoirs différens, il ne peut les concilier que s’il possède ce moyen d’influence, d’essence un peu mystérieuse, mais d’efficacité certaine, qu’on appelle l’autorité. L’autorité s’exerce doucement, sans bruit, sans étalage ; elle est acceptée et non pas imposée ; sa forme la plus naturelle est le conseil qui est suivi parce qu’il est jugé bon, et que celui qui le