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REVUE. — CHRONIQUE.

s’est élevé avec sa verve habituelle contre une mesure dont l’étroite mesquinerie le révoltait, et il a eu gain de cause contre M. Combes dans le groupe même que celui-ci préside. Il est vrai que dans le groupe voisin, celui de l’Union républicaine, il y avait unanimité contre les procédés d’exclusion arbitraire imaginés par les radicaux. Le groupe a déclaré qu’il n’irait pas à la réunion plénière si on en excluait toute une fraction du parti, et comme on ne pouvait pas se passer de lui, comme la qualification de plénière appliquée à une assemblée où il ne serait pas allé n’aurait plus été qu’un mot chargé d’ironie, il a bien fallu capituler. M. Combes en a été pour sa courte honte. Cependant il a été un peu plus heureux à la Chambre : là, on a fait une cote mal taillée. On a commencé par ouvrir la porte aux socialistes unifiés, ce qui ne surprendra personne. Puis, on a distingué entre les progressistes : on a admis les uns et exclu les autres. Il faut avouer qu’ils avaient eux-mêmes rendu cette distinction plus facile en se séparant en deux groupes dont l’un est allé un peu plus à gauche avec M. Thierry, et dont l’autre est resté très honorablement sur ses positions premières. C’est ce dernier seul qui a été frappé d’ostracisme. Soit ! Dans une lettre qu’il a écrite à M. Combes, M. Paul Beauregard s’est montré peu soucieux de se voir décerner ou refuser un brevet de confession républicaine par les grands prêtres du radicalisme, mais il a dénoncé la profonde hypocrisie d’une pareille opération. Le parti radical est plein d’anciens bonapartistes qui le redeviendraient sans nul doute si l’Empire était rétabli. En attendant, bons républicains, bons radicaux, bons socialistes, ils dénoncent comme indignes des hommes qui ont combattu à l’âge héroïque pour la fondation de la République. A quoi bon s’indigner ? Mieux vaut hausser les épaules de pitié. Mais l’exclusion d’un seul républicain, à quelque fraction du parti qu’il appartienne, n’est pas faite pour augmenter le prestige et l’autorité de la réunion qu’on persistera à qualifier de plénière et qui ne le sera pas.

La question est d’ailleurs très au-dessus des groupes et des sous-groupes qui se sont si fort agités depuis quelques jours. Il est naturel et légitime que le parti républicain choisisse son candidat, mais ce candidat, s’il est élu président, devra veiller et pourvoir à des intérêts qui sont supérieurs à ceux d’un parti et, bien que la France soit aujourd’hui inséparable de la République, peut-être même pour ce motif, c’est à la France même qu’il devra regarder. Les intérêts de la République ne nous paraissent en ce moment menacés par rien : en est-il tout à fait de même de ceux de la France ? M. le président du Conseil, dans les derniers discours qu’il a prononcés, en a parlé en termes élevés et,