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quoique diminuée, sera encore très grande dans le Parlement de Dublin.

A côté de M. Balfour, siège le nouveau chef élu des conservateurs, M. Bonar Law. Il se donne beaucoup de mouvement et fait beaucoup de bruit. Il ne laisse jamais finir une discussion sans se lever pour la résumer en quelques phrases sonores, d’autant plus sonores qu’elles sont parfois un peu vides. On lui a dit : « Vous êtes un second Chamberlain, » et l’on sent qu’il s’applique à justifier l’analogie toutes les fois qu’il ouvre la bouche. Il cherche le sarcasme oratoire, le mot en coup de poing, qui conclut une bataille oratoire en renversant l’adversaire à ses pieds. Oserai-je avouer que cette rhétorique parait quelquefois un peu vulgaire et hors de sa place ? M. Bonar Law ne sortira pas grandi de cette session d’automne.

Elle n’ajoutera pas grand’chose, non plus, à la réputation de M. Walter Longet de M. Austin Chamberlain. Cependant, il faut savoir gré à celui-ci de ne tenter aucun effort pour imiter son père. Il veut se faire une manière à lui et il y a déjà, en partie, réussis Ne jamais parler sans avoir quelque chose à dire, telle semblait sa devise, et c’est celle qui convient à un excellent debater. Lord Hugh Cecil, qui sait si bien s’imposer par son accent austère et religieux dans certaines questions, n’a pas joué un rôle important dans le débat et M. F. E. Smith, le brillant et spirituel orateur que le Parlement ne voit jamais se lever sans se promettre une heure d’amusement, était absent au moment de la discussion.

C’est surtout du côté ministériel que la discussion a été pauvre et languissante. Presque tous les chefs d’emploi étaient invisibles. Sir Edward Grey, retenu au Foreign-Office par les affaires européennes, ne paraissait qu’à l’heure des questions ; M. Winston Churchill et M. Lloyd George se tenaient à l’écart et M. Asquith n’avait, pour l’assister, lorsqu’il était présent, ou pour le remplacer en cas d’absence, que M. Birrell, le principal secrétaire pour l’Irlande, l’attorney gênerai sir Rufus Isaacs et M. Herbert Samuel, le ministre des Postes. Augustin Birrell est un fantaisiste qui ne prend au sérieux ni ses adversaires, ni ses collègues. Son humour excentrique amuse le Parlement et, surtout, l’amuse lui-même, mais ne sert pas beaucoup les causes dont on lui confie la défense. Sir Rufus Isaacs est un adroit chicanier, très expert sur les questions de procédure, et M. Herbert