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n’empêche pas d’être un brave homme. Rester simple chef de chambrée n’a rien de déshonorant. Ce rôle convient à certaines natures rustiques, mal préparées à des responsabilités plus hautes, mais très propres à des fonctions de détail. Et la preuve que plus d’un s’en contente, c’est que nous avons dans nos compagnies un certain nombre de caporaux rengagés.

Concluons donc qu’un cadre plus détaillé, plus différencié, tient un meilleur compte des diversités d’aptitudes, et tire des valeurs d’hommes un meilleur rendement. Conservons nos caporaux, si bien à nous, que Rabelais reconnaîtrait encore en eux ses caporions ; encourageons-les davantage au rengagement et gardons-nous d’emprunter leurs unter-offizier à ceux qui nous avaient emprunté autrefois nos sergens.

Ceux-ci forment l’ossature essentielle de la compagnie. Le dernier projet ministériel fixe leur nombre à 7 au lieu de 6. Moins de soldats et plus de gradés : il y a là une conséquence nécessaire et une relation de cause à effet. C’est que le noyau de l’unité active doit présenter au dehors une enveloppe d’autant plus ferme et plus résistante qu’au dedans il est plus maigre et plus léger de chair. C’est que cette enveloppe doit pouvoir se grossir tout à coup d’une pulpe nombreuse, — les réservistes, — et ne faire du tout ensemble qu’un seul fruit vivant.

Ainsi, de la solidité du cadre sous-officiers dépend celle de l’unité mobilisée et portée au pied de guerre. Mais il y a plus. Nos régimens actifs, on le sait, doivent donner naissance à des régimens de réserve, avec lesquels ils sont jumelés par avance et dont ils préparent la mobilisation. Ils leur prêtent une partie de leur personnel, notamment des sous-officiers. Ceux-ci disparaissent de l’unité-mère, qui recomplète avec des gradés réservistes son personnel encadrant.

Cette disparition, ce remplacement, exigent de nos sous-officiers non seulement le nombre, mais aussi la qualité, et font comprendre que la proportion des rengagés ait été fixée aux trois quarts de l’effectif total. M. Messimy avait accepté d’abaisser ce chiffre aux deux tiers, pour des raisons budgétaires ; mais cette concession n’était pas conforme à l’esprit général de son projet, et depuis, la Commission de l’armée a été conduite à rétablir le rapport des trois quarts. Il résultera de cette disposition que, sur 142 sous-officiers, le régiment d’infanterie n’en aura que 37 non-rengagés. Ceux-ci, tous dans leur