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l’argent tout d’abord, sous forme d’impôts directs et indirects. La population indigène de la Tingitane, comme les autres provinciaux, paie le tribut, impôt sur la fortune, perçu par les municipalités et versé par elles au Trésor romain. Le contrôle financier était aux mains d’un procurateur spécial, assisté d’un nombreux personnel subalterne : répartiteurs, caissiers, commis de toute espèce. En outre, la province acquittait l’impôt indirect sous forme de douanes. Le système douanier romain différait profondément du nôtre. Nous cherchons surtout dans les douanes un moyen de protéger l’industrie nationale. Rome, maîtresse du monde, n’avait pas à craindre de concurrens au dehors. Les douanes étaient essentiellement pour elle un moyen de remplir les caisses de l’Etat et, pour mieux atteindre ce but, elle avait multiplié les lignes douanières. L’Empire avait été divisé en un certain nombre de circonscriptions à la limite desquelles les marchandises devaient acquitter les droits. L’Afrique proprement dite (Tunisie et Tripolitaine) formait une de ces circonscriptions. Il est probable que l’ensemble des provinces de l’Afrique occidentale (Numidie, Maurétanie Césarienne, Maurétanie Tingitane) en formait une autre. Le taux variait dans le reste de l’Empire de 2 à o pour 100. Nous ne le connaissons pas pour les douanes de Tingitane.

La question du service militaire des indigènes africains, si délicate pour nous en Algérie, ne.se posait pas pour Rome. L’armée romaine sous l’Empire était une armée de métier recrutée par engagemens volontaires. Sauf dans les cas de nécessité absolue où l’on pouvait procéder à la levée en masse, le service personnel obligatoire n’existait pas. Rome se trouvait ainsi, en vertu même de sa loi générale de recrutement, employer vis-à-vis des indigènes marocains le même système d’enrôlemens volontaires que la France en Algérie. Mais ces volontaires n’étaient pas les seuls soldats que Rome tirât de sa province de Tingitane. Les tribus du Sud Marocain, établies le long de la frontière, avaient, entre autres obligations vis-à-vis de l’Empire, celle de lui fournir un contingent en hommes dont l’effectif était strictement déterminé par les traités. Ces troupes indigènes étaient organisées en « goums » spéciaux qui venaient grossir l’effectif de l’armée régulière. On les employait soit à la garde du pays, soit même, en cas de besoin, hors d’Afrique. Quelques-uns de leurs chefs s’élevèrent par leurs talens militaires