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ces formes. Depuis le XVe siècle, on a conservé le style antique, et ce style a été assez souple pour se prêter, plus ou moins bien, il est vrai, aux diverses expressions qu’on lui demandait.

A la fin du XVIIIe siècle, moins que jamais, on ne pouvait songer à renoncer à l’art antique pour se rattacher à d’autres traditions et faire renaitre les styles du Moyen âge. Cela n’aurait pu se faire que s’il y avait eu à ce moment un réveil de foi chrétienne, mais précisément le siècle n’est pas religieux. Les réformateurs, loin d’agir au nom de la religion, vont l’englober dans leurs anathèmes. Ils ne la séparent pas de la monarchie. C’est au nom de la philosophie qu’ils agissent et l’antiquité, l’antiquité païenne, plus que jamais, redevient souveraine.

Le Baroque et le Rococo, ces formes si nouvelles et si audacieuses, par lesquelles les maitres du XVIIe et du XVIIIe siècle avaient exprimé les idées modernes, sans se préoccuper de rester fidèles à la pureté des formes classiques, l’âge nouveau les condamne au nom de son culte pour l’art antique. Les philosophes du XVIIIe siècle répudiant la société corrompue de la royauté devaient renoncer aux formes de son art et redemander à la vraie tradition antique les préceptes directeurs d’un art nouveau.


Cet art qui porte justement le nom de Néo-classique a compris, au cours de son évolution, certaines divisions secondaires, correspondant aux diverses phases de la vie française : Fin de la Royauté, Révolution, Empire, Restauration.

Dans les dernières années du règne de Louis XV, et sous le règne de Louis XVI, la pensée française pleine d’espoirs, tout heureuse d’entrevoir un nouvel état social, une ère prochaine toute faite de bonheur pour le peuple, conçoit un art très simple, mais charmant, d’une grâce et d’une jeunesse ravissante ; c’est comme l’épanouissement d’une ère virginale, et à juste titre le style Louis XVI restera parmi les gloires les plus pures de l’art français.

Mais la réalité ne correspondait pas aux espérances. La France fut impuissante à trouver dans le calme les réformes désirées. Tout s’effondre et les cataclysmes de l’intérieur joints aux dangers de l’extérieur font naître une société d’où tout sentiment d’élégance et de joie légère va disparaître, une société qui sera obligée de faire appel avant tout aux plus âpres sentimens d’énergie. Ce n’est plus une Flore ou une Cérès que l’on aimera à évoquer, c’est le glaive des Horaces que l’on mettra dans les