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avec des argumens a priori que l’on peut répondre. Le fait est là qui a justifié de telles recherches. Et s’il est vrai que le sculpteur n’a pas les mêmes ressources que les peintres, il est néanmoins certain qu’il lui est permis, dans une réelle mesure, de lutter avec eux et ne pas se borner à concevoir le bas-relief comme ne pouvant recevoir que des figures disposées sur un seul plan. Les anciens, les Grecs et les Romains, avaient déjà entrevu cette forme d’art, mais ils n’en avaient donné que de timides essais. Il était réservé aux maîtres florentins du XVe siècle de créer cette nouveauté, une des plus fécondes de l’histoire de l’art. L’Algarde continue leur œuvre et la perfectionne. Il ne se contente plus de petits bas-reliefs ciselés avec le soin et la finesse que permet l’outil des orfèvres, il aborde les compositions magistrales, et par de grands bas-reliefs sculptés, comme avec des peintures, il peut décorer les autels et les parois des églises.

Et il n’y a pas un reproche à faire à cet art dont toutes les visées sont légitimes. Pour en comprendre toute la puissance, il faut voir le bas-relief de l’Attila à Saint-Pierre, qui fut le modèle dont toute une école pendant longtemps s’inspira ; il faut voir l’église de Sainte-Agnès où l’Algarde, aidé par ses élèves, notamment par Ercole Ferrata et Domenico Guidi, a conçu et réalisé cet admirable programme de décorer toute une église avec de grands tableaux de marbre. Combien ne devons-nous pas aimer un maître à l’enseignement duquel nous devons notre Puget !

L’Algarde n’eut pas à Rome les mêmes faveurs que le Bernin. C’étaient deux concurrens, on pourrait presque dire deux ennemis, en lutte non seulement par leur talent, mais par les idées qu’ils représentaient. Aussi la production de l’Algarde fut-elle bien loin d’égaler celle du Bernin. Son art s’épanouit surtout pendant la disgrâce du Bernin sous Innocent X. C’est le moment où il décore Sainte-Agnès et, avec Borromini, Saint-Jean de Latran.


Mais ce n’est pas dans la manière de l’Algarde que se développe l’école du XVIIe siècle. A l’art narratif de ce maître on préfère l’art plus brillant et plus passionné de son rival.c’est autour du Bernin, pour exécuter les immenses travaux qui lui étaient confiés, que nous voyons se former toute une armée de sculpteurs. Ceux qui appartiennent au début du siècle ont encore la simplicité, la délicatesse que les maîtres bolonais avaient