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un trouble réel si on la tolérait. Nous savions qu’une immense manifestation se préparait pour le 8 août, jour où expirait la détention de Rochefort. Et nous décidâmes que Rochefort ne serait pas mis en liberté ce jour-là, et serait maintenu en état d’arrestation jusqu’à ce qu’il eût purgé son autre condamnation à quatre mois de prison (c pour coups et blessures portés au sieur Rochette. »

L’Impératrice, jugeant notre proclamation du matin trop morne, nous engagea à en faire encore une. Séance tenante, je rédigeai le texte suivant : « Français, nous avons dit toute la vérité. Maintenant, à vous de remplir votre devoir ; qu’un même cri sorte de toutes les poitrines d’un bout de la France à l’autre. Que le peuple entier se lève frémissant pour soutenir le grand combat. Quelques-uns de nos régimens ont succombé sous le nombre, notre armée n’a pas été vaincue. Le même souffle intrépide l’anime toujours. Soutenons-la. A l’audace momentanément heureuse, opposons la ténacité qui dompte le destin, replions-nous sur nous-mêmes, et que nos envahisseurs se heurtent contre un rempart invincible de poitrines humaines. — Comme en 1792, comme à Sébastopol, que nos revers ne soient que l’école de nos victoires. Ce serait un crime de (douter un instant du salut de la patrie et surtout de n’y pas contribuer. Debout donc, debout ! Que la France, une dans les succès, se retrouve plus encore une dans les épreuves, et que Dieu bénisse nos armes ! »

A la fin du Conseil arriva un télégramme de l’Empereur nous demandant l’effet que produirait à Paris une retraite de l’armée sur Châlons. Nous répondîmes que si cette retraite était nécessaire, le Conseil n’y ferait pas d’objections. C’est sur l’avis de Rouher surtout que cette réponse fut envoyée.


EMILE OLLIVIER.