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Voici toutes les nouvelles que nous avons : Le maréchal Mac Mahon concentre ses troupes et s’apprête à réparer l’échec, le malheur éprouvé par une de nos divisions. Cette division ne se composait que de 6 000 à 7 000 hommes : elle n’a battu en retraite, après un long et héroïque combat, que devant deux corps d’armée. Je vous le répète, le maréchal Mac Mahon en position d’arrêter les ennemis va venger un avantage momentané qu’ils n’ont dû qu’à leur grand nombre. (Bravo !) Répandez-vous dans Paris, et dites partout que le gouvernement vous donnera toutes les nouvelles certaines. Si elles sont bonnes, nous vous les donnerons avec joie ; si elles sont mauvaises, nous vous les donnerons avec confiance, sûrs qu’un revers passager n’ébranlera pas votre patriotisme et votre foi dans le succès final. Ayez confiance en nous, comme nous avons confiance en vous. Pendant que nos frères se battent à la frontière, ayons, nous, assez d’empire sur nous-mêmes pour les aider par notre patience (Bien !) et unissons-nous pour crier d’un élan unanime : Vive la patrie ! (Cris de : Vive la patrie ! vive la France !) Oui, unissons-nous pour crier ensemble : Vive la France ! » (Applaudissemens ; cris de : Vive la France !) Sur ces paroles, la foule se dispersa.

Chevandier, qui, au ministère de l’Intérieur, avait trouvé la même surexcitation, lui avait donné le même démenti. Il avait envoyé son secrétaire général, d’Auribeau, à la Bourse, rétablir la vérité et commencer une enquête. La désillusion fut aussi prompte à se répandre que l’avait été la joie ; en peu d’instans, la consternation d’une grande espérance déçue fut générale. Un rassemblement irrité fit irruption dans l’enceinte de la Bourse, saccageant les barrières et la corbeille des agens de change. Ce devint un véritable champ de bataille ; il fallut sonner la cloche de clôture et appeler la police. Un autre rassemblement encore plus nombreux envahit la place Vendôme, réclamant de nouveau ma présence. Je m’avançai une seconde fois sur le balcon. Je dis en substance : « Toutes les nouvelles qui m’arriveront seront immédiatement portées à la connaissance du public. Cependant, il y a certaines nouvelles que nous ne vous dirons pas, parce qu’elles indiqueraient des mouvemens de troupes qui, aussitôt connus à Paris, seraient télégraphiés chez nos voisins et qui tourneraient au détriment de nos armes. Quant à l’auteur de la fausse nouvelle, il est arrêté. — Son nom? s’écrie un furieux. — Je l’ignore, répondis-je. Le saurais-je, je ne vous le