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On connaît bien, pour la Prusse, d’une façon assez précise, les fortunes supérieures à 20 000 marks (25 000 fr.), grâce aux statistiques qui servent de base à l’assiette de l’impôt complémentaire[1] ; on n’a point de données pour les patrimoines inférieurs. D’autre part, les chiffres publiés par certains économistes, qui arrivent au total formidable de 445 milliards de francs, paraissent exagérés ; mais, en les réduisant même d’un tiers ou d’un quart, on voit que, dès maintenant, l’Allemagne est plus riche que la France. M. Steinmann-Bucher considère le chiffre de 250 milliards de francs, avancé par M. Schmoller en 1902, comme très éloigné de la vérité. Voici comment il établit un montant bien supérieur, en évaluant sous six rubriques différentes les élémens de la fortune allemande :

Les propriétés mobilières et les immeubles, abstraction faite de la valeur du sol. — Le total en est établi d’après les sommes pour lesquelles ces propriétés sont assurées contre l’incendie auprès de compagnies indigènes et étrangères, de mutuelles, d’établissemens publics. L’ensemble des polices s’élevait en 1905 à plus de 200 milliards. Si certaines d’entre elles dépassent la valeur réelle des objets assurés, le contraire est vrai dans beaucoup de cas. En outre, 25 pour 100 des meubles ne sont pas assurés et quelques centaines de petites unions d’assurances ne figurent pas dans la statistique officielle. D’ailleurs, le total de 1905 a dû s’accroître considérablement en 1912 et s’élève sans doute aujourd’hui, d’après notre auteur, à 225 milliards de francs.

La valeur du sol des villes et des campagnes. — Dans les agglomérations urbaines, il arrive que cette valeur dépasse celle des constructions édifiées sur lui. D’autre part, les terrains qui constituent la périphérie immédiate des cités ont une tendance constante à la hausse, alors même qu’ils servent encore à la culture ; car les produits qui s’y récoltent se vendent à des prix en progrès constant, grâce à la proximité de centres de consommation de plus en plus vastes. Le moment vient ensuite où l’extension des villes les transforme successivement en terrains à bâtir. Depuis 1871, le nombre des grandes agglomérations ne cesse d’augmenter chez nos voisins, et la proportion des habitans

  1. L’impôt complémentaire (Ergaenzungssleuer) frappe les capitaux de toute nature à raison d’environ un demi pour mille ; un projet récemment déposé au Lundtag prussien propose d’élever ce taux d’à peu près un tiers.