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se généraliserait parmi les indigènes, avec l’aide matérielle et morale du pouvoir.

Seulement, pour atteindre ce but, le premier à poursuivre à l’heure actuelle, il faudrait donner à l’Algérie des moyens que ses contrats avec une banque de circulation ne suffiront jamais à lui fournir. C’est en faisant largement appel à son propre crédit, et non autrement, qu’elle pourra étayer celui de ses enfans, et leur ouvrir des champs d’activité fructueux pour tous. Maintenant qu’un vaste programme de travaux publics en cours d’exécution a donné satisfaction pour quelque temps à l’un des besoins les plus pressans de la colonie, aucune tâche plus importante ne la sollicite que de répandre sur son sol l’eau et l’argent qu’il réclame. Or, pour l’une et pour l’autre, le problème est identique. De même que, par un article de loi bienfaisant et ignoré, M. Jonnart a obtenu pour la colonie le droit de garantir les emprunts des syndicats d’hydraulique agricole, on devrait accorder à l’Algérie l’autorisation de cautionner les associations de crédit mutuel. Européens ou indigènes, les petits propriétaires ont le même besoin de cet appui et montreront la même aptitude à s’en servir honnêtement et prudemment. Dût-elle aller plus loin, et fournir aux mutualités agricoles les fonds qu’elle emprunterait à cet effet et dont les preneurs lui serviraient l’intérêt, la collectivité n’y trouverait guère, croyons-nous, de mécomptes. Les retards qui pourraient se produire dans les règlemens à la suite d’une mauvaise récolte seraient toujours réparables et se chiffreraient sans doute beaucoup moins haut que les pertes occultes ou visibles subies chaque année par son budget en raison de l’insuffisance des cultures ou des rendemens.

Un danger plus sérieux et qui s’est déjà manifesté, serait de voir les avances de l’Etat accaparées par un petit nombre d’agriculteurs aisés. On ne saurait trop réclamer que les statuts des caisses régionales abaissent autant que possible, non seulement le maximum du montant des prêts, mais le minimum des cotisations exigibles des adhérens. Il serait souhaitable aussi que les administrateurs de ces associations comprissent, comme ils l’ont fait en quelques endroits, la convenance de ne pas faire escompter leurs effets par la caisse régionale dont ils ont la gestion. C’est assez que la Colonie leur donne, en subventionnant ces institutions, un moyen considérable d’influence et d’action