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LE
RÉALISME DES ROMANTIQUES

Sous ce titre très heureux : le Réalisme du Romantisme[1], le distingué critique M. Georges Pellissier publie un volume où il s’est efforcé de ruiner certaines doctrines qu’il considère comme des préjugés, et comme des préjugés assez dangereux. On oppose généralement le romantisme d’une part au classicisme, d’autre part au réalisme ; on représente le romantisme comme une réaction contre le classique, et le réalisme comme une réaction contre le romantique. Il n’y a rien de bien juste dans tout cela, affirme et s’applique à prouver M. Pellissier. D’une part, ce n’est pas contre le classicisme proprement dit, c’est-à-dire contre l’école de 1660 que le romantisme s’insurge, c’est contre le néo-classicisme ou le pseudo-classicisme ; c’est contre Voltaire et Delille ; d’autre part, — et c’est la thèse sur laquelle M. Pellissier a le plus insisté, — le romantisme est un mouvement déjà réaliste, duquel le réalisme proprement dit devait très naturellement sortir. Le romantisme a presque toujours (oui, il faut dire presque) confessé et professé un grand respect pour le XVIIe siècle, pour Corneille, pour La Fontaine, pour Racine, même pour Boileau ; et il a été un appel à la vérité, laquelle a été proprement l’idole même du XVIIe siècle. Ce qu’il a méprisé, attaqué, détruit et remplacé, — la meilleure manière de détruire, — c’est l’art de Voltaire et de Delille ;

  1. Le Réalisme du Romantisme, par M. Georges Pellissier, 1 vol. in-16 ; Hachette.